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  • (8/21) Le temps de perdre

     

    En un sens vieillir est inhérent à vivre dès le début, il en est un acte consubstantiel, le seul ininterrompu, quoi que nous fassions ou ne fassions pas, quelque tour que prenne notre vie.

     

    Tous ces deuils que la face vieillissement de notre vie nous amène à vivre, nous les considérons d'abord avec légèreté, sans vraiment y prêter garde.

    Tant que vivre est grandir, se former, se projeter dans un avenir. Quand on choisit un métier, qu'on commence à l'exercer, qu'on trouve un compagnon, une compagne, qu'on devient parents, l'élément dynamique de construction domine le tableau.

    Il faut faire des choix parfois frustrants, renoncer à rêver certaines choses, mais il s'en présente tant d'autres.

     

    Et puis à un moment, vivre n'est plus que décliner. Plus ou moins vite, plus ou moins visiblement, plus ou moins crucialement. Mais irrémédiablement.

    « Ce que je serai dorénavant, ce ne sera plus qu'un demi être, ce ne sera plus moi. Je m'échappe tous les jours et me dérobe à moi. »

    (Montaigne Essais II,17 De la présomption)

     

    Sur quoi alors s'appuyer pour bien vieillir ? Il y a un gain possible en liberté et en vérité. La perte des ancrages et des obligations sociales est une déliaison, on ne sait plus à quoi se raccrocher. Mais c'est aussi, en même temps, une libération, une relaxe.

    La perte narcissique, surtout pour les femmes ayant intégré la nécessité d'être gentilles et plaisantes, peut ouvrir sur une autre liberté, celle de ne plus avoir à faire bonne figure.

    Au sens concret comme au sens moral. Je plais, je conviens, tant mieux. Je ne suis pas comme il faut, tant pis.

     

    Bien entendu, ces libertés ne sont accessibles qu'à ceux et celles qui d'une part restent à peu près en santé. Et d'autre part ont accès à une vie décente, ont une subsistance assurée. Car à tout âge la pire disgrâce est la pauvreté qui asservit.

    C'est ici qu'arrivent les interrogations sur le volet social. Bien vieillir est impossible pour des vieux pauvres, sans la sollicitude, le soin à la fois affectif et matériel, dispensés par la collectivité.

    D'où recherche de scénarios soutenables pour l'ensemble du corps social dans une société nettement vieillissante, confrontée de surcroît à un chômage non négligeable.

    Lesquels ? Bonne question.

    À laquelle je n'ai pas de réponse.