Clodoweg dans son commentaire nous suggère la cruauté. Suggestion fort pertinente. La cruauté en effet est une absolue négation de l'autre. C'est aussi l'avis de Montaigne
"Je hais, entre autres vices, cruellement la cruauté, et par nature et par jugement, comme l'extrême de tous les vices." Essais II, 11 (De la cruauté).
Pour ma part je visais le mensonge. Pourquoi le mensonge n'est-il pas dans la liste ? C'est une vraie question : franchement je ne vois pas comment interpréter ce non dit.
(Sinon à suspecter les théologiens de n'être pas toujours très francs du collier, mais bon pas de procès d'intention …)
"Notre communication se conduisant par la seule voie de la parole, celui qui la fausse trahit la société publique" dit encore Montaigne qui décidément ne parle jamais pour ne rien dire.
Le mensonge est le ver dans le fruit, à même de pourrir toute relation, depuis les relations amicales, amoureuses, familiales, jusqu'aux relations dans la société publique. Il est par excellence la perversion de la confiance.
Dans le genre capital, c'est à dire induisant à sa suite nombre d'autres méchancetés, vices ou malfaçons, le mensonge se pose là.
Car il ne concerne pas seulement la parole effective, le prononcé. Il atteint aussi le pensé, le conçu.
En particulier avec ce mensonge existentiel qui consiste dans le faux-self, le moi en porte-à-faux.
"Le revers de la vérité a cent mille figures et un champ indéfini" dit encore Montaigne. Le mensonge qui prend la vérité à revers serait donc nommé à bon droit le père de toutes les perversités.
Ce serait au moins aussi approprié que le fameux l'oisiveté est mère de tous les vices.
Quant au chiffre de cent mille, il amène à la comparaison avec le beaucoup moins considérable 7. Sept péchés capitaux seulement ?
De toute évidence le chiffre est retenu pour sa charge symbolique, entendant désigner à lui seul le champ indéfini dont parle Montaigne.
Et puis c'est pratique, c'est le nombre des jours de la semaine.
"C'est lundi c'est colère !" (Jour de la Lune et des lunatiques). Jeudi jour de Jupiter roi des dieux, pour l'orgueil (j'ai dit quelque chose ?). Vendredi jour de Vénus, pour la luxure. Mercredi jour de Mercure dieu du commerce, pour l'avarice. Samedi repos de shabbat, disons la paresse. Mardi jour de Mars, pour l'envie à la source des guerres. Dimanche jour du Maître, pour la gourmandise. Parce que le Maître se taille la part du lion.
(Tout ceci est un peu tiré par la crinière je le reconnais).
Commentaires
Chère Ariane,
J'apprécie ce choix du mensonge, auquel j'avais pensé aussi. Car tout bien pesé, c'est vrai que c'est celui qui ne m'inspire aucune indulgence, plutôt des envies de vomir. Je voudrais signaler les petites sœurs : la dissimulation et l’hypocrisie, qui sont le mensonge des faibles et des pervers qui n'ont même pas le courage d'assumer en face leur mensonge.
Et je peux confirmer au vu de ce qui se passe dans le lycée où je travaille, que cela fait des dégâts dans la société publique. Le plus grave, c'est que je ne crois pas que ce fonctionnement soit le fait des individus, mais plutôt des "modes de gouvernance" que les grands chefs imposent aux petits chefs.
Désolé de cette amertume ; ça fait un peu défouloir, mais c'est nécessaire de temps en temps...
Oh que oui utilité du défouloir ! La marge de manoeuvre et de liberté de l'individu dans les rouages d'une société, en particulier dans les relations hiérarchiques au travail : vaste et cruciale question en effet ...
Bon allez courage bientôt les vacances !