Dans les propositions qui suivent, Spinoza se centre sur la passion par excellence, l'amour.
Il l'envisage selon la triple logique qu'il a posée :
1) la force de l'imagination/représentation
(L'homme, suite à l'image d'une chose passée ou future, est affecté du même affect de joie et de tristesse que suite à l'image d'une chose présente. prop.18 cf Même si elle n'existe pas)
2) l'imitation des affects
(De ce que nous imaginons une chose semblable à nous, que nous n'avons poursuivie d'aucun affect, affectée d'un certain affect, nous sommes par là même affectés d'un affect semblable. prop.27 cf Spéculation)
3) le besoin de reconnaissance
(Nous nous efforcerons également de faire tout ce que nous imaginons que les hommes considèrent avec joie, et au contraire nous aurons de l'aversion à faire ce que nous imaginons que les hommes ont en aversion. prop.29 cf Habituellement humanité)
Leur conjonction implique que la passion amoureuse a tendance à s'indexer sur l'affect supposé d'un supposé rival. Le flottement d'âme qui en découle nous amène vers des eaux freudiennes, et leur mythique triangle oedipien.
Spinoza décrit dans le cadre de cette indexation le renchérissement ou la dévaluation de l'objet aimé (prop.31), assortis de l'esprit de propriété à son égard (prop.32), ce qui amène la définition de la jalousie :
« Si quelqu'un imagine que la chose aimée joint à elle-même un autre, du même lien d'amitié, ou bien d'un plus étroit, que celui par lequel il la possédait seul, il sera affecté de haine envers la chose aimée, et il enviera cet autre. »
(Spinoza Éthique part.3 prop.35)
Une jalousie dont l'expression se fait extraordinairement crue dans le scolie qui suit :
« Qui en effet imagine une femme qu'il aime se prostituant à un autre, non seulement sera attristé de ce que son propre appétit se trouve réprimé, mais encore, parce qu'il est contraint de joindre l'image de la chose aimée aux parties honteuses et aux excrétions de l'autre, il l'a en aversion. »
Dérangeant, non ?