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  • Opium du peuple

    « L'amour et la haine à l'égard d'une chose que nous imaginons être libre doivent l'un et l'autre être plus grands, à cause égale, qu'à l'égard d'une chose nécessaire »

    (Spinoza Éthique part.3 prop.49)

     

    « De là suit que les hommes, du fait qu'ils s'estiment libres, se poursuivent les uns les autres d'un amour ou bien d'une haine bien plus grands qu'ils ne font des autres choses ; à quoi s'ajoute l'imitation des affects ».

    (scolie prop.49)

     

    D'où l'intérêt, pour esquiver une probable haine, d'arriver à convaincre les autres que le mal qu'on leur inflige est chose nécessaire.

    « C'est comme ça, c'est une loi de la vie, de l'économie (le célèbre there is no alternative de Thatcher en son temps), ou encore c'est la volonté de (tel ou tel) Dieu ».

    Ce qui amène naturellement la question : comment se fait-il que tous les perdants, les malmenés, les sacrifiés de ces fausses nécessités se laissent convaincre ?

     

    Réponse : Nous sommes par nature ainsi constitués que nous croyons facilement à ce que nous espérons, et difficilement à ce qui nous fait peur, et que nous en faisons soit plus soit moins de cas qu'il n'est juste. Et c'est de là que sont nées les superstitions auxquelles les hommes sont partout en proie. (Scolie prop.50)

    C'est à dire que la superstition nous convainc plus que la raison, triste réalité.

     

    Exemple aujourd'hui. Pourquoi est-on porté à minimiser (faire moins de cas qu'il n'est juste) le changement climatique dont l'emballement de plus en plus évident rapproche les conséquences destructrices non plus à moyen mais à court terme ?

    C'est que ça fait vraiment trop peur. À quoi s'ajoute l'imitation des affects (cf Raccord) : après tout, les autres y zont pas l'air de s'en faire. Alors pourquoi que je m'en ferais ? Les autres y font pas d'efforts de sobriété pour éviter la cata. Alors pourquoi que j'en ferais, moi, des efforts ?

     

    Ainsi se rend-on sourd à la raison qui appelle à modifier d'urgence notre mode de vie, et on préfère penser : la science trouvera bien une solution. Et l'on s'en remet passivement à ce qu'il faut bien appeler une superstition technologique.

    Paradoxal, non ? Je dirais même plus : oxymorique.