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  • 48 nuances d'affects (19) Gloire, honte et juste mot

    « XXX. La Gloire (gloria) est une Joie qu'accompagne l'idée d'une de nos actions dont nous imaginons que d'autres la louent.

    XXXI. La Honte (pudor) est une Tristesse d'une action dont nous imaginons que d'autres la blâment. »

    (Spinoza Éthique Partie 3. Définition des affects)

     

    Après la série d'affects « entre soi et soi », commencée avec l'acquiescentia in se (cf 15), ces deux-là font revenir un tiers dans le circuit.

    Le tiers avait déjà été précédemment considéré pour les affects découlant du binôme amour/haine (cf 6 et la suite jusqu'à 15). Mais c'était dans un contexte de réalité factuelle.

    Alors qu'ici (différence de taille) le tiers est envisagé à travers le filtre de l'imagination, dans une relation virtuelle.

    Du coup on les reconnaît ces affects, ils nous sont familiers, imprégnés que nous sommes des modes de pensée et de communication façonnés par l'usage des résasociaux.

    Spinoza dans l'explication renvoie à un passage précédent du texte qui nous le confirme : 

    « Il peut se faire que la Joie dont quelqu'un imagine affecter les autres soit purement imaginaire (…) il peut donc aisément se faire que le glorieux soit orgueilleux, et imagine être agréable à tous alors qu'il est pénible à tous. » (Scolie prop 30 partie 3)

    Voilà qui sent une fois encore le ça c'est fait, accompagné à nouveau d'un sourire. L'orgueilleux est pénible certes, mais il est avant tout comique, précisément parce qu'il n'a pas le sens du ridicule.

    Quant à l'affect de honte, Spinoza précise, toujours dans l'explication :

    « Il faut noter ici la différence qu'il y a entre la Honte (pudor) et la Pudeur (verecundia). La Honte en effet est une Tristesse qui suit un acte dont on a honte. Et la Pudeur est une Crainte, autrement dit une Peur qui retient l'homme de faire quelque chose de malhonnête. »

    OK la différence en effet est celle entre pudor et verecundia, confirme mon vieux Gaffiot (ça nous aurait étonnés que Spinoza fasse de l'à peu près).

    N'empêche le traducteur a dû rigoler en imaginant notre tête, à nous lecteurs, devant ce petit chassé-croisé entre latin et français, non ?

    Mais on ne va pas le lui reprocher, la traduction est chose austère, qui demande non seulement du travail mais une belle abnégation. On vous accorde donc bien volontiers ce genre d'innocentes compensations, ô vous traducteurs et trices, serviteurs et servantes du mot juste.