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B.attitude (5) La part de Dieu, les paramètres

 

 

Résumé des épisodes précédents.

Notre héros, mû par son conatus singulièrement altruiste, a décidé de tendre la main à ses congénères pour leur fournir le mode d'emploi du bonheur de vivre. Il s'inscrit ainsi dans une démarche radicalement humaniste.

 

Humanisme, humanisme, je veux bien, dira-t-on, mais il y a du Dieu dans l'Ethique, oui ou non ? Il y a du Dieu et d'une certaine manière il n'y a que ça, d'où tout découle d'une infinité de manières. Où quand comment pourquoi ? Et comment ça s'articule avec la descente en flammes de la religion ? C'est ce qu'on va comprendre dans les prochains épisodes.

 

Non, je blague. Pas sûr qu'on comprenne, mais bon, on va essayer de lire.

L'Ethique commence donc du côté de chez Dieu. D'une manière qui n'est pas sans évoquer la boutade la guerre est une chose trop sérieuse pour la laisser aux militaires. Pour Spinoza, le concept de Dieu est trop déterminant pour le laisser aux fantasmes religieux. Il doit au contraire être abordé réellement. En le dégageant des projections anthropomorphiques, dont la plus ravageante à la fois pour l'intellect et pour le conatus est la notion de volonté de Dieu. Notion absurde pour lui, que dans une page de l'Appendice de la partie 1 (encore ? Eh oui), une page superbe de verve et de lumineuse intelligence, il appelle l'asile de l'ignorance.

 

Mais venons en au fait.

Par Dieu, j'entends un étant absolument infini, c'est à dire une substance consistant en une infinité d'attributs dont chacun exprime une essence éternelle et infinie. (Partie 1 définition 6)

 

Cette définition est la 6, et par conséquent, comme dirait M. de la Palice, il en faut 5 autres avant d'y arriver. Je vois cela comme un paramétrage. Il pose les paramètres utiles et après la notion se définit, se repère, en fonction de ces paramètres. Dieu est avant tout un objet géométrique comme les autres.

Les paramètres nominated pour la définition de Dieu sont : cause de soi (1), chose finie (2), substance (3), attribut (4), manière (5).

 

Mais soulignons d'abord j'entends (intelligo), répété, outre cette définition 6, dans les 1,3,4,5.Spinozase méfie des incertitudes du langage, en particulier des termes ditsTranscendantaux, comme Etant, Chose. Pour lui ces termes signifient des idées confuses au plus haut degré. Il explique qu'on perd ainsi beaucoup de temps et d'énergie à des controverses oiseuses, que ce soit en religion ou en philosophie (scolie 1 prop 40 partie 2). Alors ici son j'entends sert à sortir de la confusion, à décider une bonne fois pour toutes (au moins pour la suite du livre) d'un sens précis pour la notion.

 

Ainsi briefés, revenons donc aux paramètres. Nous ne retiendrons que ceux qui apparaissent dans la déf 6. (déjà bien beau, hein?)

 

2 Est dite finie (finita) en son genre, la chose qui peut être bornée (terminari potest) par une autre de même nature. Par ex un corps est dit fini parce que nous en concevons toujours un autre plus grand. De même une pensée (cogitatio) est bornée par une autre pensée. Mais un corps n'est pas borné par une pensée ni une pensée par un corps.

 

3 Par substance, j'entends ce qui est en soi et se conçoit par soi : c'est à dire, dont le concept n'a pas besoin du concept d'autre chose d'où il faille le former.

 

4 Par attribut, j'entends ce que l'intellect perçoit d'une substance comme constituant son essence.

 

Et à cause du mot éternelle dans la déf, on est obligé de rajouter

 

8 Par éternité j'entends l'existence même en tant qu'on la conçoit suivre nécessairement de la seule définition d'une chose éternelle.

 

C'est cela. Voilà voilà. Je me demande où on en serait si on n'avait pas viré les idées confuses au plus haut degré ...?

Vous savez quoi ? Substance, attribut, tout ça j'ai envie de courageusement faire l'impasse. Courageusement, j'ai bien dit. L'homme libre montre la même vaillance (animositas) ou présence d'esprit à choisir la fuite qu'à choisir le combat (Partie 4 corollaire prop.79). Retenez-la, celle-là, elle peut servir.

En l'occurrence, j'assume de le dire tout net, ce genre de mots ça me bloque. Naguère encore je me serais fait violence pour toutes sortes de mauvaises raisons du genre c'est pas fair play envers tes lecteurs, ou encore je vais passer pour une ignorante. Résultat je serais bêtement allée recopier des infos dans quelque bouquin. Et par la même occasion je serais allée à l'encontre de mon conatus, diminuant ainsi ma joie donc ma puissance d'exister. Trop con, non ? Heureusement, maintenant que je suis tombée au milieu de Spinoza, je me sens parfois un peu plus légère, presque autant que Montaigne qui n'a jamais voulu se ronger les ongles à l'étude d'Aristote.

 

C'est pourquoi je vais me contenter de la main tendue par les c'est à dire ou autrement dit pour reformuler à mon tour. La prochaine fois. Parce que tous ces concepts un peu étouffe-chrétien, faut le temps de les digérer, non ?

Bref, bon appétit.

 

A suivre

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