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Inconstance (7)

 

Mais les médecins lui représentèrent que pour l'instant entourer Mlle Fortmolle de trop d'ardeur risquait de mettre sa vie en danger : il fallait laisser aux brûlures le temps de cicatriser.

Sylvestre laissa, occupant son amoureuse impatience à se remémorer les charmes enivrants de sa bien-aimée, qui donnaient quelque chose de si piquant à son mâle courage.

Enfin on l'autorisa à aller lui rendre visite. Elle qui était passée de la chambre 322 à la chambre 213, étage du dessous, au fond du couloir à gauche.

 

Sylvestre entra. On avait le matin même retiré à Mlle Fortmolle ses derniers bandages. Sur le drap impitoyablement blanc de l'hôpital, il vit un visage que le feu avait sabré à grands coups iconoclastes.

 

Le temps d'un éclair, Sylvestre revit la palpitation des ailes du nez, la peau si fine qu'on l'aurait dite transparente, les taches de rousseur sur les pommettes, qu'il devinait sucrées comme de petits œufs de Pâques, et surtout cette fossette qui se creusait au coin droit de sa bouche quand elle prononçait certains mots.

Il se souvint de l'envie impérieuse de l'embrasser qu'il avait ressentie un matin alors qu'elle disait aux premières B3  « Le devoir sur la respiration me sera remis vendredi ».

Mais en cet instant, considérant ses joues couturées il ressentit, hélas la vérité m'oblige à le dire, un haut-le-cœur. Il fut pris de panique à l'idée qu'il était entré pour demander sa main à Mlle Fortmolle.

 

Des mains, il y en avait deux sur le drap blanc, deux feuilles mortes craquelées abandonnées sur un tas de neige.

 

Sylvestre alors sentit qu'il ne serait jamais à la hauteur. Sans chercher à l'excuser, on doit à la vérité de dire que naître sans peau ne confère pas toutes les vertus, et que Sylvestre, tout écorché vif qu'il fût, avait le droit, après tout, de manquer de sensibilité.

 

Et aussi que rien n'est plus effrayant que le vrai visage de l'amour.

 

À suivre.

 

 

 

 

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