« Il coûte si peu aux grands à ne donner que des paroles, et leur condition les dispense si fort de tenir les belles promesses qu'ils vous ont faites, que c'est modestie à eux de ne promettre pas encore plus largement. »
La Bruyère Les Caractères (Des grands 6)
Suivez mon regard.
Mais au fait, question : pourquoi considérons-nous que l'aspirant gouvernant doive faire des promesses ? Aujourd'hui, dans le système démocratique caractérisé par la possibilité du libre choix électoral ?
Du temps de La Bruyère, de la monarchie absolue et de l'inégalité sociale admise sinon bien supportée, il était logique que le rapport aux grands fonctionnât (imparfait du subjonctif symptôme de contamination par la langue du XVII°) selon le binôme requête/promesse.
Rien n'étant légalement dû, ou si peu, il était inévitable que, semblables aux fontaines des jardins de Versailles, les promesses cascadassent depuis le bon plaisir du roi, par le canal de grands très grands et de haute noblesse, puis d'un peu moins grands et nobles, jusqu'aux petits grands.
Desquels le peuple, petit et grand, attendait quelques gouttes en fin de parcours.
Mais en démocratie, où le législatif et l'exécutif sont censés n'exercer leurs pouvoirs que par délégation des citoyens (ou disons pour être plus précis du corps électoral), c'est à nous citoyens qu'en principe il appartiendrait d'alimenter et canaliser la fontaine.
Limpide, non ?
Mais non : c'est pas demain la veille qu'élus ou autres « grands » se détacheront de la mentalité furieusement Ancien Régime qui caractérise notre monarchie républicaine.
À moins que nous ne les y aidions. En y renonçant pour notre part.
Mais bon je dis ça je dis rien. Ils promettent, ils promettent pas, ils tiennent, ils tiennent pas : tout ça n'est pas si grave. Le monde ne s'est jamais si bien porté, non ?
Partout on ne fait assaut que de fraternité, et il règne à l'ONU une super bonne ambiance.
Quant à l'Europe ? Un modèle de coopération.
Et les capitalistes ? Trop partageux !
Le sens de la responsabilité écologique ? Il tient le haut du pavé, mobilisant l'ensemble de la communauté internationale si soucieuse de la survie de notre espèce humaine.
Bref tout baigne.
Et en plus ici chez nous la gauche plus unie que ça elle meurt.
Bon allez, j'arrête de me faire du souci.
Promis.
Commentaires
Bon, je ne voudrais pas paraître oiseau de mauvaise augure mais je crains que d'ici la présidentielle la Gauche ne soit encore plus unie que ça.
Hélas je le crains aussi. Mais je ne vois pas la logique de cette désunion : il n'y aura que des perdants (surtout nous les citoyens, sans nous vanter). Bon les causes de cette attitude suicidaire je les vois : pathétiques querelles d'ego, absence de largeur de vues, de sens collectif.
Y a des jours on voudrait rien penser, genre être une autruche, ça simplifierait la vie.