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La musique adoucit les moeurs

Je préfère la musique de Wagner à celle de quiconque. Elle fait tant de bruit qu'on peut parler d'un bout à l'autre du morceau sans que les gens entendent ce qu'on est en train de dire.

Oscar Wilde (Le portrait de Dorian Gray)

 

Je me souviens avoir assisté à une représentation de L'Or du Rhin durant laquelle mon voisin de fauteuil passait le temps en mangeant des bonbons. Il les extrayait l'un après l'autre du papier cellophane ou je ne sais quoi, produisant force crissements.

Avait-il lu Wilde et en déduisait-il que son geste ne nuisait pas à l'audition du maître de Bayreuth ? Ou était-ce juste un gros beauf ?

À l'époque, encore pleine de patience, j'ai attendu un bon moment avant de l'informer qu'il me gênait (apparemment il ne gênait pas les autres) (ils ne parlaient pas pourtant, sans doute dormaient-ils malgré le volume sonore).

En homme courtois il s'est arrêté aussitôt ma remarque.

Pour reprendre son manège cinq minutes après (comme le gros beauf qu'il était, donc) (et tout ça sans m'offrir un bonbon) (je les aime pas mais quand même) (sauf les caramels) (à petites doses bien sûr).

Bref vous savez quoi c'est bien tombé pour lui que je ne sois pas fan absolue de Wagner. Au lieu de L'Or du Rhin c'était La Flûte enchantée, faites-moi confiance le mec se prenait deux tartes dans la gueule au premier bonbon.

 

En fait dans Wagner ce que je préfère, c'est la réplique d'un personnage de Woody Allen : Quand j'entends du Wagner, j'ai envie d'envahir la Pologne.

Non je plaisante il y a des choses fort belles.

Et puis comment ne pas évoquer l'immortelle séquence d'Apocalyse now au son de la Walkyrie. Séquence fascinante, jouant avec les troubles affects (et la pulsion de mort) que peuvent révéler en nous certaines sensations musicales.

Indépendamment de ses accrochages avec Wagner, il est clair que c'est cette perception qui a conduit Nietzsche à honnir sa musique, à en faire un tabou, après l'avoir idolâtrée.

Bon l'ennui c'est qu'il a déclaré dans la foulée que le nec plus ultra musical c'était Carmen de Bizet, justement parce que d'après lui ça exaltait la libido. Ça laisse songeur, aussi bien sur son esthétique que sur sa conception de la libido (mais ceci ne nous regarde pas).

Enfin bref c'est pas pour cafter mais y en a qui ont l'oreille plus sûre. Je ne parle pas de moi (enfin oui aussi). Mais dans la catégorie des philosophes, par exemple, on peut penser à la réflexion de Kierkegaard sur la musique de Don Giovanni.

 

 

 

 

Commentaires

  • Je me souviens d'une représentation de l'Or du Rhin à la télé.
    Les personnages, en costumes modernes évoluaient dans le décor d'une sorte de ville d'eaux.
    Cette histoire dont des dieux étaient les protagonistes en devenait sordide de bout en bout.

  • Reste à savoir si ce côté sordide était voulu par le metteur en scène ? (C'était qui ?) Peut être comme Nietzsche voyait-il beaucoup de glauque dans les profondeurs, sinon du Rhin, du moins de la pensée de Wagner ?

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