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Alors la volonté générale devient muette

Quand le nœud social commence à se relâcher et l'État à s'affaiblir ; quand les intérêts particuliers commencent à se faire sentir et les petites sociétés à influer sur la grande, l'intérêt commun s'altère et trouve des opposants, l'unanimité ne règne plus dans les voix, la volonté générale n'est plus la volonté de tous, il s'élève des contradictions et des débats, et le meilleur avis ne passe point sans disputes.

(IV,1 Que la volonté générale est indestructible)

 

Oui mais tout ceci n'est guère évitable. Rousseau l'a dit plus haut, chaque système porte en lui des facteurs propres de dégénérescence. Ceux qu'il décrit ici sont précisément ceux de la démocratie.

Débat, contradiction, dispute : sans cela difficile de discerner les ajustements nécessaires au maintient du cap de l'intérêt commun. Ils font aussi partie du processus de sa définition initiale, processus de mise en place d'une plate-forme commune à tous les intérêts particuliers. Encore faut-il que ce processus soit bien pensé et surtout bien conduit.

Le plus difficile est d'éviter que le moteur démocratique s'emballe. Qu'on ergote au lieu d'argumenter, qu'on satisfasse un prurit de contradiction avant d'essayer de comprendre les autres points de vue.

Quelles causes à cet emballement ? Comme pour les crimes, elles se partagent (ou se combinent) entre le passionnel ou le crapuleux.

Côté passionnel, le citoyen (à quelque niveau qu'il soit, en haut ou en bas) peut régresser vers l'infantilisme des égoïsmes capricieux, des jalousies de bac à sable. Il peut être tenté, encore plus régressif, par le despotisme narcissique et irresponsable de Sa Majesté Bébé (éloquente expression de Papa Freud).

Côté crapuleux, la tendance anti-démocratique se met en effet au service d'intérêts particuliers, individuels ou d'appartenance à différents groupes. Plus les groupes sont sectaires (au sens propre), plus les intérêts sont forts, et plus le moteur s'emballe.

 

Alors la volonté générale devient muette, tous guidés par des motifs secrets n'opinent pas plus comme Citoyens que si l'État eût jamais existé, et l'on fait passer faussement sous le nom de Lois des décrets iniques qui n'ont pour but que l'intérêt particulier.

Et ça, Rousseau ne s'y résigne pas.

« Toute l'affaire du livre IV est de montrer comment on peut tenir éveillée la volonté générale dans le cœur des citoyens et la faire parler.» (dit B. Bernardi)

Toute l'affaire du livre IV du Contrat social, mais surtout de la vie démocratique.

 

 

 

 

 

 

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