« Ces affects de haine et leurs semblables se rapportent à l'envie, qui pour cette raison n'est rien d'autre que la haine même, en tant qu'on considère qu'elle dispose l'homme à se réjouir du malheur d'autrui, et, au contraire, à s'attrister de son bonheur. »
(Spinoza Éthique part.3 scolie prop.24)
Il est intéressant de mettre ceci en regard de :
« l'appétit (et de là le désir, appétit avec conscience de l'appétit) n'est rien d'autre que l'essence-même de l'homme, de la nature de quoi suivent nécessairement les actes qui servent à sa conservation » (scolie prop.9 cf Généalogie de la morale)
Le désir et l'envie s'opposent donc radicalement. Le désir est porteur d'une dynamique de vie. Donc à la fois actif et positif.
L'envie est au rebours, à l'inverse. Elle dénigre, défait, dévitalise.
L'envie est typiquement l'affect « passif-agressif ».
On envie parce qu'on se sait ou se croit impuissant dans son désir. Alors on voudrait voir détruit chez l'autre ce qu'on ne peut avoir. Ou être.
Le désir et l'envie s'opposent comme les deux mères lors du jugement de Salomon (1er livre Rois chap 3 v.16-28)
Deux femmes se disputent le même enfant. Chacune en avait un, mais l'une des deux a étouffé (involontairement) le sien en dormant. Elle échange son enfant mort avec l'enfant vivant de l'autre femme. Celle-ci, quand elle s'en aperçoit, va demander justice à Salomon.
« Coupez l'enfant en deux, donnez la moitié à chacune » est la sentence.
L'envieuse, qui veut juste que l'autre n'ait pas ce qu'elle n'a pas, accepte.
Mais l'autre, dans la puissance de son désir, a ce cri du cœur :
« Donnez-le à cette femme, qu'il vive ! »