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(7/14) Je laisse vaciller l'autre

« Nulles propositions m'étonnent, nulle créance me blesse, quelque contrariété qu'elle ait à la mienne. Il n'est si frivole et si extravagante fantaisie qui ne me semble bien sortable à la production de l'esprit humain. »

(Montaigne Essais III,8 De l'art de conférer)

 

Suivent quelques exemples de croyances superstitieuses. Lui, c'est pas qu'il y croie mais bon « je m'aime mieux douzième ou quatorzième que treizième à table ».

 

Il présente son raisonnement selon une métaphore qui lui est coutumière, celle de la balance. Penser vient de pesare, peser. Peser quoi ? Le pour et le contre, les poids respectifs des arguments. Chose à laquelle l'avait habitué sa charge de juge.

Mais plus profondément, la balance est littéralement sa signature.

Il en fit son blason d'auteur et de penseur (son blason en tant que Monsieur des Essais), en faisant graver sur un mur de sa librairie une balance assortie de la devise sceptique Que sais-je ?

 

L'exercice de la suspension de jugement sceptique est affaire d'équilibre toujours instable, de pondération à établir sans cesse, par essais et erreurs successifs.

Comme on équilibre les plateaux de la balance à l'aide de différents poids.

« Où l'un plat est vide du tout en la balance, je laisser vaciller l'autre, sous les songes d'une vieille. (…) Encore sont en poids les opinions vulgaires (du café du commerce) et casuelles (ce qui passe par la tête) autre chose que rien en nature.

Et, qui ne s'y laisse aller jusque là, tombe à l'aventure au vice de l'opiniâtreté pour éviter celui de la superstition (croyance irréfléchie)»

 

Ces opinions sont du grand n'importe quoi, oui sans doute, mais derrière les opinions il y a des gens qui certes ne pensent pas toujours en rigueur de termes, mais existent en nature.

Et à ce titre les rejeter d'emblée est faire preuve d'un défaut rédhibitoire pour qui veut penser : l'a priori, qui implique la rigidité.

Si et comment toute vérité est bonne à dire, that is the question. Mais ici une chose est sûre : toute opinion est bonne à entendre, pour être analysée, pesée à son juste poids.

 

Après on pourra en tirer quelque chose. Ou pas. En tous cas il ne faut pas immobiliser trop vite le plateau vacillant.

 

 

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