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(11/21) Au bout

 

« Au jugement (= ici observation, leçon tirée, plutôt qu'évaluation morale) de la vie d'autrui, je regarde toujours comment s'en est porté le bout ;

et des principaux études de la mienne, c'est qu'il se porte bien, c'est à dire quiétement et sourdement. »

(Montaigne Essais I,19 Qu'il ne faut juger de notre heur qu'après la mort)

 

Quiétement et sourdement : sans agitation ni angoisse, sans bruit superflu.

Je ne sais si, comme le dit (l'espère) ici Montaigne, c'est affaire d'étude, de ce qu'on appellerait aujourd'hui travail sur soi.

J'ai tendance à penser que c'est plus facile quand la mort arrive au grand âge. Au passage, remarquons l'ineptie, l'inadéquation de cette expression.

Au contraire à un certain point d'avancée en âge tout rapetisse : le corps se ratatine, l'espace se restreint (du lit au fauteuil et puis du lit au lit), le temps s'effiloche en lambeaux de passé de plus en plus difficiles à recoudre ensemble.

Le grand âge émousse ainsi les sensations comme les sentiments, estompe les souvenirs et floute même le présent, dilue la pensée dans le seul être-là du corps animal.

Alors peut être laisse-t-on la vie vous quitter simplement, naturellement, comme fait un chien qui se couche.

Il arrive même, un exemple familial me l'a montré, que se porter au bout quiètement et sourdement soit donné, étonnamment, à la fin d'une existence travaillée de tristesse et de lassitude de vivre.

Comme si, sous les turbulences de surface, un flux de quiétude, une petite rivière de paix n'avait cessé de couler, imperceptible, dans les profondeurs d'une mer traversée de tant de courants tumultueux.

 

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