Tout nous allait, tout nous souriait. On y croyait.
Ça marchait. Nous avancions.
Quand on nous disait : vos buts sont si lointains, dans vos calculs surtout du hasard. Ça craint, non ?
Nous disions : pas du tout. Nous savions avoir raison.
Quand on nous disait : trop ardu pour vous, trop haut, nous nous insurgions. Un hic ? Un mur ? Mais non, aucun pour nous.
Quand on nous disait un jour ça n'ira plus, nous rigolions.
Aussi sûr qu'il fait jour au matin, nous irions au bout.
Alors pourquoi ? D'où vint l'accroc ? Nous n'avons pas compris d'abord.
Nous satisfaisions, croyions-nous, à tout. Parfaits soldats, luttant toujours au maximum. Vaincus, nous ? Voyons ! Fuyards ? Allons, quoi !
Mais voilà. La fin fut là, d'un coup.
Parfois un sort brutal a raison, sans raison.
On aurait dit un sphinx surgissant tout à coup. Un roc d'inconnu qui disait : tu n'as pas su, tu sais pas, tu sauras jamais.
Pourtant si, nous avons compris, à la fin. Nous avons vu : il y avait un truc malin, brut tout autant, un mal, un vrai mal.
Il avançait à bas bruit. Aujourd'hui il avait fini son parcours. Il arrivait.
Il aurait fallu pouvoir nous garantir avant. Aujourd'hui nous n'avions plus aucun pouvoir d'opposition à lui.
Qui, lui ?
On aurait dit un sphinx, il rugissait. Mais sans bruit.
Il nous fascina. Il nous voulait. Nous n'avions aucun choix. Nous irions au pays où il dominait. Pays inconnu mais si connu pourtant. Où tout aboutissait toujours.
Nous irions là-bas.