« J'ai les oreilles battues de mille tels contes : ''Trois le virent un tel jour en levant ; trois le virent le lendemain en occident, à telle heure, tel lieu, ainsi vêtu.'' Certes je ne m'en croirais pas moi-même.
Combien trouvé-je plus naturel et plus vraisemblable que deux hommes mentent, que je ne fais qu'un homme en douze heures passe, quand et les vents(1), d'orient en occident ? Combien plus naturel que notre entendement soit emporté de sa place par la volubilité(2) de notre esprit détraqué, que cela, qu'un de nous soit envolé sur un balai, au long du tuyau de sa cheminée, en chair et en os, par un esprit étranger ?
Ne cherchons pas des illusions du dehors et inconnues, nous qui sommes perpétuellement agités d'illusions domestiques et nôtres. »
(Montaigne Essais livre III chapitre 11 Des boiteux)
(1)En suivant les vents.
(2)La facilité à se laisser entraîner d'un côté et de l'autre. Le mot vient du latin volvere = tourner, faire des va et vient. La volubilité dont il parle implique donc une certaine facilité à se laisser rouler.
J'ai peut être l'esprit mal tourné, mais je trouve que ce mot de volubilité condense de façon étonnante les détraquements de la communication, et pas seulement à son époque …
Commentaires
On pourrait peut-être y adjoindre la volatilité ?
En effet. Cela dit, la volatilité n'est regrettable que pour des contenus denses et utiles ...