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Rares, simples, générales

« Qu'ont gagné nos législateurs à choisir cent mille espèces et faits particuliers, et y attacher cent mille lois ? Ce nombre n'a aucune proportion avec l'infinie diversité des actions humaines, la multiplication de nos inventions n'arrivera pas à la variation des exemples. (…)

Il y a peu de relation de nos actions, qui sont en perpétuelle mutation, avec les lois fixes et immobiles. Les plus désirables, ce sont les plus rares, plus simples et générales ; et encore crois-je qu'il vaudrait mieux n'en avoir point du tout que de les avoir en tel nombre que nous avons. »

(Montaigne Essais livre III chapitre 13 De l'expérience)

 

On sent ici le juge un peu lassé de compulser des tonnes d'archives, de devoir intégrer sans cesse de nouvelles lois, de nouveaux éléments de jurisprudence. Faut dire qu'en son temps les juridictions se chevauchant selon les endroits, les principes de jugements n'étaient pas vraiment harmonisés.

Du coup on le comprend, même si son argument sent un peu l'alibi. Certes l'être humain est éminemment sujet à la variation et à la mutation, mais bon faut bien quand même que la société fonctionne. Et en particulier que la loi protège ceux qui ont besoin de l'être, en dissuadant voire sanctionnant ceux qui ont besoin de l'être.

Cela dit l'idée de lois rares, simples et générales, Rousseau l'énonce aussi quand il dit vouloir ne pas donner le nom de lois à de simples ajustements au cas par cas, mais le réserver aux décisions de la volonté générale.*

« Mais qu'est-ce donc enfin qu'une loi ? 

Quand tout le peuple statue sur tout le peuple, il ne considère que lui-même, et s'il se forme alors un rapport, c'est de l'objet entier sous un point de vue à l'objet entier sous un autre point de vue, sans aucune division du tout. Alors la matière sur laquelle on statue est générale comme la volonté qui statue. C'est cet acte que j'appelle une loi. (...)

Quand je dis que l'objet des lois est toujours général, j'entends que la loi considère les sujets en corps et les actions comme abstraites, jamais un homme comme individu ni une action particulière (…) en un mot toute fonction qui se rapporte à un objet individuel n'appartient point à la puissance législative. »

(Du Contrat social II,6 De la loi)

 

*Si le lecteur-trice veut se rafraîchir la mémoire sur le Contrat social : voir la lecture que j'en ai proposée dans la revue Fragile, en accès (libre et sécurisé) sur internet fragile-revue.fr

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