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Un cheval ou un chien perdu

« C'est raison qu'ils prennent la vérole s'ils la veulent savoir panser. Vraiment je m'en fierais à celui-là(1). Car les autres nous guident comme celui qui peint les mers, les écueils et les ports, étant assis sur sa table et y fait promener le modèle d'un navire en toute sûreté. Jetez-le à l'effet(2), il ne sait par où s'y prendre.

Ils font telle description de nos maux que fait un trompette de ville qui crie un cheval ou un chien perdu : tel poil, telle hauteur, telle oreille ; mais présentez le lui, il ne le connaît pas pourtant(3).

(Montaigne Essais livre III chapitre 13 De l'expérience)

 

(1)Celui parmi les médecins qui ferait cela : attraper la maladie qu'il lui faut soigner.

(2)Dans la réalité de la situation.

(3)Il ne le reconnaît pas pour autant.

 

Bon on est d'accord ce point de vue se discute. Ce qui fait le bon praticien n'est pas d'être malade comme le malade, mais de savoir l'écouter, pour adapter son savoir (théorique et pratique, acquis par l'expérience du métier), le moduler en fonction du patient réel et de ses besoins. Encore faut-il bien sûr posséder un savoir : il était très limité dans le cas des médecins auxquels Montaigne avait à faire.

Sa lassitude, son agacement, je les comprends. Même hors situation de maladie, on peut élargir le propos. Que de fois dans un souci, une douleur, un conseilleur (bien intentionné ?) prétend vous guider, telle une maquette de navire, étant assis sur sa table. (Et bien content de voir ça de loin).

Certes on ne lui demande pas de s'embarquer avec vous au milieu des écueils bien réels dans les ballottements des vagues bien réelles qui vous malmènent (surtout qu'il n'y montrerait qui sait pas davantage de zénitude que vous). Mais qu'au moins il admette votre façon de vivre les choses. Que tout simplement il vous respecte, vous et vos soucis, tout négligeables qu'il les juge (puisque n'étant pas les siens).

 

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