« n°175 : De l'éloquence.
Qui posséda jusqu'à aujourd'hui l'éloquence la plus convaincante ? Le roulement du tambour : et aussi longtemps que les rois le tiennent en leur pouvoir, ils demeureront toujours les meilleurs orateurs et fomenteurs de soulèvements populaires. »
(Friedrich Nietzsche Le Gai Savoir Troisième livre)
Un soulèvement populaire fomenté par les rois, par ceux qui sont au pouvoir ? Mais oui. Le plus achevé en terme d'aliénation, dont on a tant d'exemples partout dans le monde et au plus près de chez nous. Et dont Nietzsche n'a cessé de dénoncer le tropisme chez ses compatriotes prussiens.
Un soulèvement, ou plutôt un enlèvement populaire, que le roulement du tambour évoque parfaitement en effet : la guerre.
Mobilisation générale et roulement de tambour : oyez oyez bon peuple allez donc tuer ceux que je vous désigne pour vos ennemis car ils menacent mon pouvoir. Oui vous vous y ferez un peu tuer aussi au passage, vous y laisserez des plumes. Oui vous n'y avez aucun intérêt je sais mais je le vaux bien.
Une aliénation d'ordre guerrier qui sévit aussi dans la politique en mode populiste : des partis inféodés à un chef, des citoyens manipulés par des discours fumeux, transformés en chair à ambition, en marchepied d'une carrière.
Et que le roulement de tambour délègue son éloquence au grésillement du buzz, au discours d'un meeting télévisé, ne limite nullement son efficacité pour conduire sur le sentier de la servitude volontaire, au contraire elle s'en trouve décuplée.
Et le roulement du tambour roule toujours.