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Sur le rêve (8) Une vision directe au présent

Les adultes ont aussi parfois des rêves directs, surtout quand un besoin intense est en jeu.

« Le chef d'une expédition polaire rapporte ainsi par exemple que pendant tout l'hivernage forcé dans les glaces, avec l'alimentation monotone et les rations spartiates, son équipage rêvait régulièrement, comme les enfants, de grands repas, de montagnes de tabac, et de ce qu'ils étaient à la maison. »

(Sigmund Freud Sur le rêve chap 3)

 

Remarquons les montagnes de tabac qui s'imposent comme exemple de besoin intense à l'esprit de ce « médecin viennois qui fumait des cigares pour se donner un cancer de la langue » comme dit avec une affectueuse ironie Delphine Horvilleur (Il n'y a pas de Ajar Grasset 2022).

Plus sérieusement, on sait que les rêves d'enfin manger à sa faim, d'enfin retrouver son chez soi, sont rapportés dans beaucoup de récits de déportés.

Freud poursuit « Il est certain que ce serait pour les énigmes du rêve une solution simple et satisfaisante si par exemple le travail d'analyse devait nous permettre de ramener également les rêves d'adultes absurdes et confus au type infantile de satisfaction d'un désir diurne éprouvé avec intensité. »

Simple et satisfaisante ? Simple oui, satisfaisante pas sûr : il faut bien que notre Sigmund ait des occasions de faire preuve d'acuité clinique, de rigueur analytique et d'inventivité théorique ...

« Mais avant de quitter les rêves infantiles » il note que « je peux remplacer chacun de ces rêves par une phrase optative : Ah si (…) (pas de chance pour moi il prend ses exemples dans les rêves que je n'ai pas mentionnés. Alors disons : ah si j'étais monté sur le Dachstein) : « simplement le rêve fournit plus que cet optatif. Il montre le désir comme étant déjà satisfait, figure son accomplissement comme réel et actuel, et le matériau de la figuration onirique consiste de manière prépondérante – quoique non exclusivement – en situations et en images sensorielles le plus souvent visuelles. Dans ce groupe aussi on ne déplore donc pas complètement l'absence d'une sorte de transformation – que l'on peut désigner comme travail du rêve : une pensée à l'optatif est remplacée par une vision directe au présent. »

On ne déplore donc pas complètement l'absence : voilà qui nous fait noter pour notre part combien Freud tient à son schéma fondé sur l'hypothèse d'un travail psychique à l'origine de la production du rêve.

Ce sont les modalités de ce travail qu'il va s'attacher à étudier dans la suite.

 

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