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Sur le rêve (20) L'angoisse est ici l'ersatz

« Les rêves se divisent en trois classes, en fonction de leur rapport à la satisfaction du désir. »

(Sigmund Freud Sur le rêve chap 9)

 

Je m'arrête un instant sur cette phrase, car elle me rappelle l'admiration de Freud pour le talent nosographique de son maître Charcot (cf ma série précédente Freud avec Charcot 1/5). Il marcha sur ses traces en fait de nosographie, et plus généralement il était féru de classement en tout genre. Effet tout à la fois d'un tempérament, d'un profil psychologique, et des modes scientifiques de son époque.

« Il y a premièrement ceux qui figurent sans voile un désir non refoulé ; ce sont les rêves de type infantile, ils deviennent de plus en plus rares chez les adultes.

Deuxièmement, les rêves qui expriment de manière voilée un désir refoulé ; ce sont sans doute l'immense majorité de tous nos rêves, et leur compréhension requiert le recours à l'analyse.

Troisièmement, les rêves qui certes figurent un désir refoulé, mais sans voile ou alors avec un voile insuffisant. Ces rêves sont habituellement accompagnés d'une angoisse qui interrompt le rêve. L'angoisse est ici l'ersatz de la défiguration onirique (…) le contenu représentationnel qui nous cause l'angoisse dans le rêve a été autrefois un désir et depuis il est soumis au refoulement. »

Représentationnel : j'aurais dit ''contenu de représentations'', en meilleur français (mais qui suis-je pour contester la traduction ?)

 

À la classification déjà produite au début du livre (cf 6), Freud ajoute ici un élément non encore apparu : l'angoisse, cette angoisse qui provoque le cauchemar sur lequel nous nous éveillons en sursaut.

C'est le moment de la signaler, car elle intervient dans le cadre non plus de la simple perception du désir, mais de sa satisfaction. À ce titre elle n'est pas seulement l'ersatz de la défiguration. Le texte laisse entendre que le désir d'autrefois auquel elle se rapporte a peut être, avant de succomber au refoulement, trouvé une forme de satisfaction. Ou au moins a été considéré à l'époque sans déplaisir.

L'angoisse est donc aussi l'ersatz du plaisir passé.

C'est la même charge d'affect, mais soumise à une inversion de signe, passant du positif au négatif. Qu'est-ce qui est responsable de ce changement de signe ? C'est bien sûr l'instance qui prend en charge le refoulement.

Cette instance, c'est le surmoi, garant du principe de réalité et vérificateur de la conformité aux lois sociales et morales. Et à ce titre il entre dans ses attributions d'assumer la police des rêves.

Dans le cadre de cette police l'angoisse est le prix à payer, l'amende infligée, pour avoir goûté à nouveau, même fugacement, dans l'écume impalpable du rêve, à un plaisir passé frappé d'interdiction.

 

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