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La journée des talents (2/8)

 

Hélène avait été surprise qu’il propose de leur prêter main-forte pour l’accompagnement des élèves à la répétition.

Depuis son arrivée en septembre dernier, il ne parlait à ses collègues que pour des points précis du travail, conseil de classe, problème de matériel ou d’emploi du temps. Il n’enlevait guère ses lunettes noires, même à l’intérieur des bâtiments, son visage restait fermé.

Difficile de ne pas éprouver de malaise en sa présence.

Le mardi matin, en 2°heure, ils avaient la même pause dans leur emploi du temps. Ayant posé ses lunettes, il la fixait longtemps de ses yeux à l’iris si clair que le trou noir des pupilles y devenait vertigineux. « Un vrai regard de loup » se disait-elle.

Elle ne baissait pas les yeux. Peut être au fond préférait-elle les loups aux agneaux. Et passons sous silence tous les bœufs genre leur collègue Petitgarçon.

Le jour où pour la première fois il lui sourit, elle se demanda si, au collège ou ailleurs, elle était la seule à avoir vu que Justin de Cournonterral aux yeux de loup avait un étrange et beau sourire, un sourire d’ange.

Les bruits les plus divers couraient.

Il aurait atterri dans ce village de Haute-Provence suite à une déception amoureuse qui l’avait amené au bord du suicide. Version de Simone Fabrègues, qui occupait le CDI (si exposé aux engeances envahissantes des profs et des élèves) et ses heures d’attente de la retraite à lire des romans racontant l’amour qu’elle avait si rarement fait.

Il aurait tenu au Marais une galerie revendue lorsque son compagnon avait été emporté par le sida. C’était ce qu’affirmait Raphaël Drouault, le prof d’Arts Plastiques, devant son auditoire habituel de jeunes et jolies collègues.

Toute sa famille serait morte dans un accident de voiture dont il aurait miraculeusement réchappé, rapportait Anaïs Poitrail, qui en tant qu’infirmière suspectait qu’il fût sous l’emprise de la drogue ce jour fatal. Il aurait passé six mois en cure de désintoxication. Mais il fallait savoir que ça réussissait rarement, tôt ou tard, on rechutait. Les statistiques étaient sans appel.

Quant à Alain Petitgarçon, prof de physique, il ne voulait pas trop en dire. En tant que scientifique il se devait de rester pragmatique avant tout. Et puis c’était une question d’éthique que de respecter tout le monde et de redonner à chacun sa chance. Mais enfin, fallait-il laisser ses collègues ignorer que dans l’ancien établissement de Cournonterral, il y avait eu une histoire de pédophilie jamais élucidée ? Les parents n’avaient pas porté plainte. Oui mais enfin ... Bref il était content que son fils Gaston ne soit pas dans la classe de ce monsieur.

                                                ***

Un jour pour cérémonie aztèque … À peine Justin avait-il prononcé ces mots, que Martin Piolet déboulait, rouge et suant, escorté de deux surveillants.

« Faut ramener les élèves au collège immédiatement. Y a un gros pépin.

- Un pépin ? Quel genre ?

- Gros. La police est là. Duras …

- Augustin, ah il est retrouvé, alors ? Qu’est-ce qu’il a fait ? »

À suivre.

 

 

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