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Loupes et entourloupes

 

« S'il n'y a pas assez de bons écrivains, où sont ceux qui savent lire ? De même on s'est toujours plaint du petit nombre de personnes capables de conseiller les rois, et de les aider dans l'administration de leurs affaires ; mais s'ils naissent enfin ces hommes habiles et intelligents, s'ils agissent selon leurs vues et leurs lumières, sont-ils aimés, sont-ils estimés autant qu'ils le méritent ? »

La Bruyère Les Caractères (Des grands 22)

 

Tiens, ça aussi, Montaigne aurait pu le dire. D'ailleurs il l'a dit. Et pour cause : c'était du vécu.

De nos jours comme des siens ou de ceux de Labru, se faire conseiller en communication c'est plus vendeur, se faire prescripteur d'opinion c'est plus rétributeur, qu'essayer bêtement d'être habile et intelligent (pour de vrai j'entends, suffit pas de s'autoproclamer tel).

Pour être aimé et estimé il suffit de savoir manier toutes les ficelles de l'aliénation aptes à emberlificoter le bon peuple (ou devrais-je dire à le trumper ?) Alors à quoi bon travailler à éclairer les débats de quelque lumière ?

Rien de nouveau sous le soleil.

 

S'il n'y a pas assez de bons écrivains, où sont ceux qui savent lire ?

« … ils ne seraient pas, selon moi, mes lecteurs mais les propres lecteurs d'eux-mêmes, mon livre n'étant qu'une sorte de ces verres grossissants comme ceux que tendait à un acheteur l'opticien de Combray ; mon livre, grâce auquel je leur fournirais le moyen de lire en eux-mêmes.

De sorte que je ne leur demanderais pas de me louer ou de me dénigrer, mais seulement si c'est bien ça, si les mots qu'ils lisent en eux-mêmes sont bien ceux que j'ai écrits (les divergences possibles à cet égard ne devant pas, du reste, provenir toujours de ce que je me serais trompé, mais quelquefois de ce que les yeux du lecteur ne seraient pas ceux à qui mon livre conviendrait pour bien lire en soi-même). »

dit Proust (Le temps retrouvé cf ce blog juillet 2015)

Il y a tant de bons écrivains et penseurs, et catalyseurs d'intelligence, à disposition dans la bibliothèque mondiale, depuis les plus anciens jusqu'aux immédiats contemporains, romanciers lucides, poètes visionnaires (et l'inverse), sociologues, historiens, psychologues, philosophes, anthropologues.

Tous ils nous tendent les loupes utiles à discerner, autour de nous comme en nous-mêmes, les entourloupes génératrices des loupés de la démocratie.

Il y a tant de bons écrivains et penseurs, il ne tient qu'à nous de savoir lire.

 

 

Commentaires

  • Oui, mais il faut investir son narcissisme dans la lecture et, qu'on le fasse ou non, ni la Raison ni le Bon Sens n'y sont pour rien.

  • Je ne suis pas sûre de bien comprendre ce que tu entends par "investir son narcissisme dans la lecture", mais pour ma part, devant une oeuvre qui allie intelligence et sensibilité (ce peut être un livre mais aussi un film, un ballet, un opéra, une photo) je ressens comme un apport d'énergie, de lumière, de force.

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