Dialogue : une mère et son enfant (3 ans).
« Aujourd'hui on est à T., chez Mamie. Et demain on sera à Paris ?
- Oui c'est ça.
- Alors demain je dirai : demain je suis à Paris.
- Non, demain, tu diras : aujourd'hui je suis à Paris.
- Mais ça sera demain.
- Oui mais demain, demain sera aujourd'hui, et aujourd'hui ce sera hier. Tu diras hier j'étais à T. et aujourd'hui je suis à Paris.
- Pff ... c'est compliqué le temps !
- En fait il y a au moins une chose simple : pour celui qui parle c'est toujours aujourd'hui. »
Cette conclusion de la mère a permis de terminer fort judicieusement le dialogue à la Devos.
Remarquons au passage combien souvent l'ombre de Devos ou de Desproges plane sur les dialogues avec les enfants, habiles à interroger les évidences et à révéler le cousinage entre la logique et l'absurde.
Fin du parcours circulaire sans fin autour du rond-point.
Hier aujourd'hui demain : tournez avec les autres.
Stop ! C'est toujours aujourd'hui.
C'est toujours aujourd'hui.
Évidence linguistique du fonctionnement langagier. Il n'y a d'énonciation qu'au présent, qu'elle soit le fait du « je » d'un locuteur dans le dialogue en temps réel, ou même d'un auteur en train d'écrire son texte.
Quelque position temporelle qu'il donne aux personnages ou à un éventuel narrateur, un auteur c'est toujours aujourd'hui qu'il écrit.
C'est toujours aujourd'hui.
Consolante maxime philosophique d'allure épicurienne.
Vivre sans retour nostalgique vers le passé, sans anticipation angoissée de l'avenir. Cueillir le jour, le maintenant qu'on a sous la main, aujourd'hui, ici.
C'est toujours aujourd'hui.
Oui je sais. On ne peut pas s'empêcher de se dire que ça fait aussi un peu slogan de campagne électorale.
Quoique. La plupart des aspirants actuels au trône sont plutôt des passéistes, incapables de construire un avenir autrement que sur le modèle du « c'était mieux avant. »
Et dire qu'ils se présentent à nos suffrages ...
Intempestif, non ?