J'aime le mot quoique. Mais pourquoi que ?
Quand on dit quoique c'est qu'y a un couac.
Que se signale une dissonance subtile. Ou pas. Mais subtile c'est plus intéressant.
Quoique : peut-on, en rigueur de termes, dire qu'une dissonance est subtile ou pas subtile ? Une dissonance dissone, c'est tout. 0/1.
La musique est une science dure, comme la cybernétique. Un art dont la beauté et la séduction reposent sur la rigueur. Paradoxal, non ?
Quoique ?
Bref ce qui peut être subtil est la manière de rendre compte de la dissonance, de l'interpréter.
Quoique : n'est-ce pas la perception-même de la dissonance qui est nécessairement associée à la subtilité ?
Car s'il y a une chose que l'exposition à une dose non négligeable de bourrinitude au quotidien (limite létale parfois) peut nous apprendre, c'est que le bourrin n'a pas l'oreille absolue côté perception de la dissonance.
Le test en est l'aptitude à décoder l'humour.
Voire la déconnade.
Le bourrin, dit Montaigne, croira que je die à droit ce que je dis à feinte.
Une des choses caractérisant le plus sûrement l'humour, c'est d'être un système à quoique intégré.
Que le quoique soit explicité comme savait si bien le faire le grand Desproges (ou le gros Devos), ou qu'il reste implicite (et d'autant plus inaccessible à la bourrinitude ordinaire).
Quoique est un bon outil de décalage humoristique.
Et par là de déplacement intellectuel.
Un quoique, outre perturber l'oreille éprise d'harmonie, vient déboussoler le partisan de la ligne droite, inquiéter l'assoiffé d'unanimité.
Et par là réveiller le conformiste assoupi, l'auditeur passif.
Le quoique est éveilleur de conscience.
Le quoique accompagne le chercheur de vérité.
Le crible du quoique est un solide adjuvant de vérification scientifique, logique, éthique.
Je pense donc je quoique.
Et ça ne s'arrête jamais, un quoique en appelant un autre, dans un mouvement pendulaire.
Et ainsi il faut imaginer Sisyphe heureux certes, mais surtout quoiquant.
Heureux de quoiquer peut être ?