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Une profondeur muette et obscure

« Les guerres civiles ont cela de pire que les autres guerres, de nous mettre chacun en échauguette dans sa propre maison. C'est grande extrémité d'être pressé jusque dans son ménage et repos domestique. (…)

Je tire par fois le moyen de me fermir contre ces considérations, de la nonchalance et la lâcheté(1) ; elles nous mènent aucunement(2) à la résolution.

Il m'advient souvent d'imaginer avec quelque plaisir les dangers mortels et les attendre ; je me plonge la tête baissée stupidement dans la mort, sans la considérer et reconnaître, comme dans une profondeur muette et obscure, qui m'engloutit d'un saut et accable en un instant d'un puissant sommeil, plein d'insipidité et indolence(3). »

(Montaigne Essais livre III chapitre 9 De la vanité)

 

(1)Non le fait d'être lâche, mais ce qu'on appellerait aujourd'hui le lâcher-prise.

(2)Latinisme : d'une certaine façon.

(3)Sans aucune sensation consciente ni douleur.

 

Passage sombre et angoissé, qui en dit long sur la fatigue psychique de Montaigne après toutes ces années de guerres de religion. On le voit user, pour juguler l'angoisse de la mort, d'un procédé psychologique que l'on pourrait qualifier d'auto-hypnose.

 

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