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  • Troie (impair)

     

    Qui a réfléchi que si Pâris avait eu l'idée de distribuer trois pommes, une pour chaque déesse, la guerre de Troie aurait été évitée ?

    Bien qu'il n'en fasse pas mention explicitement, je parie que Spinoza, lui, y a réfléchi. Imaginant le raisonnement que Pâris aurait pu tenir.

    « Trois déesses impliquent nécessité de trois pommes. Sans quoi l'une ou l'autre ou l'autre, me voyant offrir une pomme à l'une et pas à elle ni à l'autre (mais ça elle s'en fout), fera sa crise d'hystérie, tombera dans les euh enfin se pâmera.

    Et qui se prendra une tarte dans la gueule à l'arrivée ? Ma pomme évidemment. CQFD. »

    Pâris ne raisonna pas ainsi, soit qu'il fût trop con pour le faire, soit qu'il fût la proie de la fatalité, toujours à l'affût d'une bonne poire. La suite est connue.

    Spinoza, lui, un savait raisonner deux se moquait de la fatalité, illusion mythique, et trois respectait la nécessité.

    « Sachant que l'accès à un agir éthique est conditionné par l'outil de la connaissance, il faut regarder ce qu'on a en catalogue » dit-il.

    Il ouvrit donc le catalogue du Système S à la page C, et y trouva trois genres de connaissance. Premier genre :

    « Nous formons des notions universelles à partir des singuliers qui se représentent à nous par l'entremise des sens de manière mutilée, confuse et sans ordre pour l'intellect. C'est pourquoi j'ai coutume d'appeler de telles perceptions connaissance par expérience vague. » (scol 2 prop 40 Partie 2 )

    Tout aussi confuse, la connaissance par opinion ou imagination qui se réfère à des signes, autrement dit fonctionne par des automatismes d'association. Lesquels ne sont pas fiables, car ils ont pour support des contenus mémoriels archivés aléatoirement sous l'effet des affects :

    « Il faut noter que tous ne forment pas ces notions de la même manière, mais qu'elles varient pour chacun en fonction de la chose qui a le plus souvent affecté le corps et que l'esprit a le plus de facilité à se rappeler. » (scolie 1)

    Par exemple sous l'effet du bombardement récurrent de telle propagande ou publicité.

    Telle est donc la connaissance du premier genre. Une pseudo-connaissance de mode passif ne mettant pas en jeu le potentiel d'acuité de l'intellect.

    Une pomme mal assimilable qui risque de nous rester sur l'estomac « La connaissance du premier genre est l'unique cause de fausseté. » (prop 41)

    Le principe de précaution nous commande donc de la jeter.

    Restent les deux autres genres.

    La connaissance du 2° genre est tout simplement la cohérence géométrique qui nous fait admettre la réalité. (Ou plutôt "l'adopter" cf Libération)

    « nous sommes une partie de la nature entière, dont nous suivons l'ordre. Si nous comprenons cela clairement et distinctement, cette part de nous qui se définit par l'intelligence, c'est à dire la meilleure part de nous, y trouvera pleine satisfaction.

    Car en tant que nous comprenons correctement ces choses-là, en cela l'effort (conatus) de la meilleure part de nous-mêmes convient avec l'ordre de la nature tout entière. » (Éthique fin de la Partie 4)

     

     

     

  • Temps

     

    « Elle est retrouvée !

    Quoi ?

    L'éternité ! C'est la mer allée avec le soleil »

    Là où Spinoza géométrise, Rimbaud fulgure (à chacun son conatus), mais leurs propos clairement se rejoignent.

    Bon OK c'est sur les hauts sommets de la génialitude visionnaire que se fait la jonction, et les rampants que nous sommes se trouvent obligés à un certain effort pour les y suivre.

    Mais c'est comme pour une randonnée en montagne, l'ivresse de découvrir une vue sublime compense courbatures & essouflatures.

    Sans compter l'air si pur qu'on a l'impression de le boire comme une eau, à la régalade, en laissant le vent baigner nos têtes nues (quoique pleines de considérations philosophiques ou autres).

    Euh bon à propos d'ivresse je devrais arrêter Rimbaud : Dieu me poétise me voici à deux doigts de sombrer dans un lyrisme échevelé.

    Bref Arthur le voyant retrouve ici Spinoza le lunetier sur deux points :

    1) pas de solution de continuité entre temporel et spatial. Ni d'ailleurs entre les différentes modalités de la matière. Mutuelle imprégnation, réversibilité entre l'eau et la lumière.

    2) l'éternité se re-trouve. C'est donc qu'elle est là, invisible peut être, mais à portée de main dans le temps vécu.

     

    Pour le dire un peu plus géométriquement & prosaïquement (Éthique Partie 1 déf 8) :

    «Par éternité j'entends l'existence même en tant qu'on la conçoit suivre nécessairement de la seule définition d'une chose éternelle »

    Plus clair, non ? Non ? Bon OK alors l'explication qui suit :

    « Elle ne peut s'expliquer par la durée et le temps, quand même on concevrait la durée sans commencement ni fin. »

    L'éternité n'est pas un temps sans bornes, elle est le caractère non-bornable du temps. Disons barbarement la non-bornabilité du temps en elle-même.

    Elle est infuse en chaque instant du temps. Elle n'est pas la transcendance du temps. Pour la bonne raison que la transcendance ça n'existe pas (cf par ex Nature).

    En réalité, il n'y a que l'immanence, et l'éternité est l'existence-même (ipsa) : oui, tout simplement.

    Car l'existence elle aussi peut être considérée dans son caractère non-bornable, in-déterminé « en tant que suivant nécessairement de la seule définition d'une chose éternelle. »

    C'est pourquoi l'éternité, tissée dans le temps, « allée avec » la trame du temps linéaire, celui qui passe, au fil duquel on naît, on vit, on meurt, il n'est pas réservé à Rimbaud ou Spinoza de la rencontrer, de la re-trouver.

    Il suffit (mais il faut) un peu d'attention à ce qui est. Bon d'accord on n'aura pas pour la dire leurs mots de pur génie. Qu'importe, pour faire corps avec l'existence-même, il y a toujours, pour tout un chacun, le mot « présent ».

    Le perdons pas, celui-là, c'est le mot de passe.

     

     

  • Système

     

    Proposition 1

    Spinoza avec l'Éthique construit ce qu'il est convenu d'appeler un système.

    Corollaire

    C'est pourquoi on dit en général, et de façon quasi systématique en cours de philo, que Spinoza est un philosophe à système.

    Explication

    Ici le lecteur, précis par système et pointilleux par fantaisie, ne manquera pas de demander : c'est quoi un système ? À cela je répondrai que par système il s'agit d'entendre un truc où on trouve tout.

    Scolie 1

    Comme à la Samaritaine.

    Scolie 2

    Attention je dis la Samaritaine, pas la Foirfouille.

    Dans le système S on trouve tout, mais pas en vrac. Au contraire tout est rangé, tout s'intègre et s'ajuste dans la chaîne d'une nécessité sans faille.

     

    Proposition 2

    Dans le système S de Spinoza, tout se tient, si bien qu'il n'y a pas d'ailleurs ni d'au-delà.

    Scolie

    Ni d'en deçà ça va sans dire mais on sait jamais.

    Corollaire

    Dans le système S il n'y a pas de transcendance, d'alibi transcendant à la vie la vraie. Et donc pas plus de suprêmitude et ce qui s'ensuit de supérieurs et supériorités en tous genres.

    Pas d'étage du dessus où le grand Boss est censé bosser (ou se la couler douce va savoir).

    Scolie 

    Mais tout ceci se trouve déjà démontré clairement dans les propositions précédentes plus haut dans ce blog. Ou plus bas en fait, puisque les notes d'un blog s'empilent les unes sur les autres comme les Stocks s'empilent dans la Réserve à la Samaritaine.

    Bref voir Conatus, Comprendre, Nature, Objet non identifié. Ou alors relisez tout, ce sera plus simple.

     

    Proposition 3

    Encore plus simple

    « Tout ce que peut percevoir l'intellect infini comme constituant une essence de substance, tout cela appartient à une seule et unique substance, et par conséquent,

    la substance pensante et la substance étendue sont une seule et même substance, que l'on embrasse tantôt sous l'un tantôt sous l'autre attribut. »

    (Éthique scolie prop 7 Partie 2)

    Scolie 1

    C'est pourquoi le système S est dit aussi U, c'est à dire unisubstantiel.

    Scolie 2

    Si par hasard vous compreniez vaguement un peu un brin de quelque chose sur tout ça avec Ariane, quelle consolante hilaritas (ou allégresse cf Rire) ce serait pour elle de n'avoir pas travaillé en vain.