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  • Travail d'artiste

    « Qualis artifex pereo »

     

    Phrase doublement raccord avec la précédente. Prononcée (dit-on) par l'empereur Néron avant son suicide, elle signifie quel artiste meurt avec moi.

    Mot à mot quel artiste je meurs : admirons la concision du latin, une de ses grandes qualités. (Quand je dis le latin je veux dire la langue latine, parce que sinon globalement les latins sont pas toujours concis concis, surtout quand ils parlent d'eux).

    Néron ne s'est pas suicidé de son plein gré vous vous en doutez. On le lui a gentiment suggéré.

    Juste retour de bâton (d'épée de poison etc.) après tout, pour qui a fait de même avec plusieurs personnes de son entourage. (Entre autres Sénèque qui fut son précepteur) (un sacré échec pédagogique hein).

    Bref Néron n'était pas un type très recommandable

    (Sénèque déjà plus) (quoique : stoïcien mais attaché à l'argent) (nobody's perfect).

    Aucun des empereurs romains ne fut recommandable en fait.

    Y compris Titus surnommé les délices du genre humain (par je sais plus qui, Suétone j'imagine). Ça dépend de quel genre on parlait, demandez aux habitants de Jérusalem en 70 post JC, pour lesquels ledit Titus organisa un remake de l'incendie de Troie.

    D'ailleurs Racine n'en dit pas que du bien non plus dans sa Bérénice.

    OK il faut mentionner le seul à qui on n'ait à peu près rien à reprocher (sauf quelques campagnes militaires par ci par là, broutilles quand on est dans ce genre de job) : Hadrien, cet empereur philosophe dont Marguerite Yourcenar se fit la mémorialiste apocryphe autant qu'inspirée.

    Mais globalement la balance ne penche pas dans le bon sens. Les dynasties d'empereurs n'ont pas manqué de brutes zépaisses. Et aussi hélas zaffinées.

    Le raffinement n'est pas un gage de non-brutitude, l'Histoire n'a cessé de le confirmer avec sa grande hache. Il lui arrive de faire fort bon ménage avec la perversion.

    Néron fut de ces pervers brutaux-raffinés. Poète et musicien, peut être avec talent pourquoi pas. La légende le montre chantant une œuvre de sa composition devant Rome en flammes (incendie également son œuvre, disent les mauvaises langues, latines ou pas).

    Puis, non content d'avoir brûlé les planches, il brûla dans la foulée un lot de chrétiens, la rumeur qu'ils étaient les incendiaires s'étant répandue comme une traînée de poudre. Rumeur lancée par Néron pardi (à ce qu'on dit).

    Une séquence (crime, calomnie-alibi pour élimination d'ennemis et opposants) reproduite souvent avec intrigues et protagonistes variés dans nombre de superproductions historiques, pour un succès jamais démenti.

     

  • Game is over

    « Acta est fabula »

     

    L'empereur auprès de qui Mécène faisait du lobbying pour Virgile s'appelait Caïus Julius Octavianus Augustus de son petit nom. CJOA si vous voulez.

    Quoique. On risquerait de confondre avec le sigle de l'association Contre JO Arnaque (association à laquelle je vous incite à adhérer en masse, Parisiens, Franciliens, Français) (ah vous serez trop contents payer des impôts pour engraisser les sponsors d'athlètes dopés ? OK j'ai rien dit).

    Bon pour notre CJOA du coup je vais dire juste Octave comme tout le monde. Ou Auguste comme d'autres tout le monde. Il fut le premier empereur de Rome.

    En fait pour faire moins genre coup d'état dictature tout ça au début ils ont dit princeps senatus = premier personnage du Sénat.

    Comme on en a un chez nous oui si vous voulez.

    Sauf qu'Octave sur les statues a plutôt le look d'un Bogosse que d'un vieux tout bouffi de s'être gavé toute une vie de sa rente élective.

    (Ce qui ne signifie pas qu'Octave ne se soit pas gavé pour sa part j'en conviens) (mais n'étant pas citoyenne romantiquaine, je me contente de m'indigner in situ sur la vie politique présente de mon pays) (y a déjà suffisamment à faire) (chacun suam merdam après totum).

    À propos de Bogosse, Octave était conscient qu'exercer le pouvoir était aussi le mettre en scène. D'où la storytelling Énéide.

    D'où aussi la phrase dont j'allais vous causer quand vous m'avez interrompue avec votre militantisme anti-JO primaire.

    Et autre contestation de prétendus serviteurs désintéressés de la démocratie, style Tartufe n'est pas mort.

    À propos, Acta est fabula signifie la pièce est jouée. Rideau, en quelque sorte. Auguste l'aurait dit sur son lit de mort. J'ai fait le maximum pour tenir mon rôle, maintenant je quitte la scène. (Mais il n'est pas interdit de me rendre un hommage posthume à la prochaine cérémonie des Césars) (à bon entendeur ave).

    Je dis pas c'est une dernière phrase qui se défend, ça vous a un petit air de distanciation brechtienne.

    Mais pour ma part, et pour rester dans le contexte théâtral, j'avoue que sans vergogne j'aurais plutôt lancé : bis !

    On sait jamais ...

     

     

     

     

  • Vagues scélérates

    « Abyssus abyssum invocat »

     

    L'abîme appelle l'abîme.

    Cette citation ne peut que nous rappeler nos plaisirs astéristiques. Je ne sais plus dans quel album, lors d'un nième naufrage du récurrent bateau pirate, un des marins lance cette phrase.

    Ce n'est pas décalé en l'occurrence. Pour nos ancêtres antiques, le prototype de l'abîme, du gouffre mortel, c'est la mer, ses vagues menaçantes toujours renouvelées, ses profondeurs glauques et insondables, que l'on soupçonne subséquemment d'être squattées par toutes sortes de monstres.

    « Eheu (entends-je se lamenter le pirate astérixien pris dans l'enchaînement d'un fatum adversum) quand ça veut pas ça veut pas, dura lex des séries.

    OK mater mea m'avait bien dit la vita n'est pas un longus tranquillus fluvius. Mais qu'est-ce qu'on a fait à Neptune pour que ça tombe semper sur nous ?

    Les gars sumus vraiment mal barrés. D'ici qu'on plonge définitivement. Video le futurum sombre, et même carrément noir. »

    À propos quid dicit la page rose de cette expression ?

    Expression figurée empruntée au psaume de David (42,8) qu'on emploie pour exprimer qu'une faute en entraîne une autre.

    Ah bon ? Quelle faute ?

    L'auteur de ce psaume

    (David rien n'est moins sûr, mais on en reparlera) (j'ai le projet de faire une série sur les psaumes) (mais c'est un gros boulot) (c'est pas que j'aime pas bosser) (mais pour qui pour quoi hein?)

    ne parle pas de faute.

    C'est juste un exilé que submergent la souffrance de l'oppression, l'angoisse, la nostalgie. Il ne se sent pas en faute, mais abandonné.

    Ce sentiment se condense dans la métaphore de la soif. Mon être a soif d'Elohim, d'El vivant (v.3).

    Ce qui l'amène à décliner différentes modalités de l'élément liquide : l'eau tranquille où il irait boire comme la biche (v.1), ses larmes d'amertume (v.4), et enfin l'eau dans sa violence mortelle (v.8)

    L'abîme appelle l'abîme, à la voix de Tes cataractes, tous Tes brisants et Tes vagues sur moi sont passés.

    Un splendide poème que je t'engage à aller lire, lector.