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    « Futilités du faste, drames de la scène, troupeaux de petit ou gros bétail, coups de lance, os à ronger, boulettes de viviers, peines et chargements de fourmis, courses effrénées de souris, marionnettes ! Il faut être en face de tout cela indulgent, sans ombrage en observant que chacun vaut ce que valent les objectifs de son effort. »

    (Marc-Aurèle. Pensées pour moi-même VII,3).

     

    Vanitas vanitatum genre … Surtout la fin, non ?

    Chacun vaut ce que valent les objectifs de son effort. Du coup peu nombreux sont ceux qui échapperont à la démonétisation.

    Je ne parle même pas pour moi, qui ne me suis jamais donné du mal que pour des choses inutiles (qui me l'ont bien rendu en termes d'échec et d'inanité) (je sais bien que le lecteur n'a pas besoin etc. mais j'ai besoin etc. cf supra).

    Mais comment ne pas être atterré devant tant d'efforts absurdes, incohérents, totalement improductifs en réalité (même s'ils sont censés produire des gains boursiers) (précisément pour cela en fait).

    Start-up germant un peu partout, sans autre but avéré (sinon avoué) que de vendre, de trouver le truc inutile voire nocif dont on n'avait pas encore songé à faire objet de commerce.

    Métiers (sic) de conseil, de communication, de marketing (bref de spécialistes en mensonge et vente de vent) proliférant au détriment des vrais métiers, ceux de production, de service au vrai sens du terme (genre ces broutilles si démonétisées que sont le soin, l'éducation).

    Et mieux vaut taire les efforts à but clairement ravageurs, voire meurtriers, pour lesquels nombreux sont ceux qui ne ménagent pas leur peine (et surtout celle des autres).

     

    Oui je sais lecteur-trice, me voici en plein scrogneugnisme. Mais vraiment je ne vois pas comment être en face de ce non sens indulgent et sans ombrage.

    L'ennui c'est que voir l'objectif (= cesser toutes les absurdités auto-suicidaires où s'enfoncent les sociétés un peu partout) est une chose, se lancer dans l'effort pour l'atteindre (et en voir les modalités surtout) c'est autre chose (je parle pour moi bien sûr) (oui c'est vrai y a pas que moi) (merci lecteur tu me consoles bien, là).

     

    Allez, je termine sur une note positive. Il y a dans la phrase de Marco quelque chose de Shakespeare, a tale told by an idiot …

    Quoi pas vraiment positif ? Et la beauté de l'écriture ? Mais bon, alors ça peut-être :

    Notre monde n'est formé qu'à l'ostentation, les hommes ne s'enflent que de vent, et se manient à bonds, comme des ballons. (Montaigne Essais III,12 De la physionomie).

    Marrant, non ?

     

  • Et réciproquement

    « Il est ridicule de ne pas vouloir éviter sa propre méchanceté – alors que c'est possible, tout en voulant éviter celle des autres – alors que c'est impossible. »

    (Marc-Aurèle. Pensées pour moi-même VII, 71)

     

    On se demande toujours avec les stoïciens : provocation, naïveté, méthode Coué ? Je t'explique, Marco.

    Premièrement chacun ne cherche vraiment à éviter que ce qui le gêne, lui. Or rares sont ceux qui ressentent leur propre méchanceté comme une gêne pour eux.

    Elle les amochise moralement ? So what ? Du moment qu'ils trouvent dans leurs actes ce qui leur fait envie : plaisir, pouvoir, argent, ils cherchent pas plus loin. 

    Deuxièmement plus on pense que la méchanceté des autres est inévitable, plus on s'autorise d'user de méchanceté envers eux. Légitime défense en quelque sorte.

     

    Conclusion, si tu me suggères, Marco, de réduire ma méchanceté par pure rationalité, OK je veux bien. Mais alors faut pousser le raisonnement jusqu'au bout.

    Et admettre qu'il peut arriver à l'autre, tout comme à moi, de chercher à éviter sa propre méchanceté, dans une vague lueur de rationalité.

    Mais si on ne l'admet pas, se donner du mal pour être quelqu'un de bien en sachant qu'en retour on ne peut que s'en prendre plein la gueule ? Tu y crois vraiment, Marco ?

     

    Alors mettons que je reformule ta pensée

    «on peut toujours essayer d'éviter sa propre méchanceté, vu qu'il n'est pas totalement improbable que les autres nous évitent la leur».

    Tu valides ?

     

  • L'arroseur arrosé

    « Veille à ne jamais éprouver à l'égard des misanthropes ce que les misanthropes éprouvent à l'égard des hommes. »

    (Marc-Aurèle. Pensées pour moi-même VII, 65)

     

    Voilà un travers, je le confesse, que j'ai du mal à éviter. Par exemple, je m'en suis donné à cœur joie avec ce pauvre Cioran (31-03-19 au 16-06-19). En fait je ne le regrette pas, on y trouve un indéniable plaisir.

    Comment l'expliquer ?

     

    Du point de vue cinématographique, c'est évident, on a affaire au bon vieux gag de l'arroseur arrosé. Et c'est un truc qui fait toujours rire, on n'y peut rien.

    Du point de vue logico-mathématique, avisons-nous de ceci que misanthroper un misanthrope est en quelque sorte annuler sa négativité, selon la règle apprise en calcul à l'école : « moins par moins égale plus ».

    Règle dont la transcription éthico-spinoziste serait : la diminution de tristesse est accroissement de joie.

    Et par là d'activité.

    Ce qui amène à remarquer que les misanthropes sont peu portés à l'action en général.

    Est-ce à dire que les misomisanthropes le seraient davantage ? Passionnant problème éthico-mathématique dont on doit préciser l'énoncé :

    la misomisanthropie doit-elle être envisagée selon la règle moins par moins? Ou doit-elle être considérée comme de la misanthropie au carré ? On me dira qu'est-ce que ça change ?

    Bonne question …

     

    Tu dis quoi, lecteur-trice ? Tu en as un peu marre de ces ergotages vains & absurdes ? J'admets.

    Mais avisons-nous de leur éventuel effet positif : dégoûtés de l'abstraction, ses inanités et ses possibles perversions, nous finirons par nous satisfaire du commerce de n'importe lequel de nos semblables humains. Que nous supposerons pour l'occasion pas trop con et pas trop méchant.

     

    Tu dis quoi lecteur-trice ? Ben oui, mais de temps en temps faut risquer des hypothèses osées, c'est comme ça que la science avance.