Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Le blog d'Ariane Beth - Page 102

  • La vertu d'une autre époque

    « n°159 : Toute vertu a son heure.

    À celui qui est intransigeant, sa probité fait souvent éprouver des remords : car l'intransigeance est la vertu d'une autre époque que la probité. »

    (Friedrich Nietzsche Le Gai Savoir Troisième livre)

     

    D'une autre époque oui et non. Au plan historique intransigeance et probité sont toujours nécessairement contemporaines, mais c'est vrai que le plus souvent chacune aimerait mieux ignorer l'autre. (Enfin c'est surtout l'intransigeance qui aimerait ignorer la probité).

    Plus directement et plus concrètement, par autre époque j'entends autre époque de la vie.

    Il me semble que la jeunesse considère généralement l'intransigeance comme une vertu (l'intransigeance envers autrui s'entend, envers soi-même à tout âge c'est une autre histoire).

    Et puis, en avançant dans la vie, on s'aperçoit que c'est plus compliqué.

    On comprend, puis l'on s'avoue, que l'intransigeance n'est pas toujours aussi pure qu'il y paraît, qu'elle peut cacher beaucoup de choses, justifier bien des alibis.

    Alors on commence à mesurer la valeur de la probité. Vertu un peu terne, vertu minimale, certes, mais c'est ce qui fait sa noblesse et son efficacité.

    Car elle est vertu d'après les certitudes, les exigences, les illusions.

    Elle est la vertu de l'accueil des choses comme elles sont, des êtres comme ils sont, la vertu de l'acceptation des conditions de la vie.

    Ou pour le dire plus simplement, elle est la vertu qui consiste à arrêter de (se) raconter des histoires.

    Bon je ne dis pas que ce soit automatiquement acquis grâce au vieillissement, ce serait trop beau. Mais c'est juste que la prise de conscience de plus en plus aiguë de la fragilité et de la relativité des choses peut aider il me semble à progresser en probité.

     

  • Incommode

    « n°158 : Qualité incommode.

    Trouver toutes les choses profondes – c'est une qualité incommode : elle fait que l'on surmène constamment ses yeux et que l'on finit par trouver plus que ce que l'on a souhaité. »

    (Friedrich Nietzsche Le Gai Savoir Troisième livre)

     

    Tu sais quoi, Friedrich ? En lisant cela, j'ai un peu l'impression que tu me dis : bienvenue au club.

    Et tu sais quoi d'autre ? Je t'avoue qu'il y a des jours je la rendrais volontiers, ma carte du club.

    Nonobstant l'honneur de t'y côtoyer ...

     

     

  • En verre

    « n°154 : Divers dangers de la vie.

    Vous ne savez pas ce que vous vivez, vous courez à travers la vie comme saouls, vous roulez de temps en temps au bas d'un escalier. Mais grâce à votre ébriété, vous ne vous rompez pas les membres lorsque cela arrive : vos muscles sont trop las et votre tête trop obscurcie pour trouver les pierres de cet escalier aussi dures que nous autres !

    La vie est pour nous un danger plus grand ; nous sommes en verre – malheur si nous nous cognons ! Et tout est perdu si nous tombons ! »

    (Friedrich Nietzsche Le Gai Savoir Troisième livre)

     

    La métaphore de la chute dans l'escalier n'a rien d'un hasard : c'est ainsi qu'est mort le père de Friedrich. On ne saura pas si monsieur le pasteur était saoul lors de sa chute.

    Mais ce qui est sûr, c'est que son fils a traversé la vie dans la conscience de sa fragilité, la conscience que, comme le verre, un rien pouvait le briser. Ou à tout le moins le fêler.