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  • Job

    « n. m. répandu fin XIX° et surtout vers 1950. Anglicisme familier.

    Travail rémunéré, qu'on ne considère généralement pas comme un véritable métier : étudiant qui cherche un job. »

    Et qui trouvera plutôt (si je peux me permettre d'interrompre cette magistrale définition) un stage non rémunéré, malgré son niveau de qualification. Certes il est probable que Robert fasse ici allusion à un truc style « job d'été », mais même l'été on a besoin de fric pour vivre je sais pas s'il est au courant. En fait je me demande si ce ne sont pas les employeurs par hasard qui souvent pensent que l'étudiant qui cherche à bosser n'a pas à prétendre à « un véritable métier », quelle que soit la saison. Passe ton bac d'abord ! - C'est fait. Ah ? Alors ton DESS. - C'est fait aussi. Ah ? Euh … Va voir du côté de Pôle Emploi, j'ai vu une annonce pour un CDD de trois jours comme plongeur au restau du coin, avec ton doctorat en océanographie tu as tes chances.

    « Tout travail, emploi rémunéré : il a un bon job. Changer de job. »

    Entre nous moi si j'ai un conseil à lui donner au mec, s'il a un bon job qu'il le garde plutôt. Il est clair que Robert Petit, il a pas trop galéré à Pôle Emploi ...

     

    « Rem. Ce mot est féminin au Canada : une job intéressante. »

    N'y aurait-il pas dans cette remarque d'apparence linguistique un message subliminal ? Ici c'est mort les cocos, le courbe de la chômage étant rebelle à tout inversion, malgré de sérieux injonctions gouvernementaux et de splendides promesses patronaux, allez plutôt tenter votre chance dans la Belle Province, Tabernacle !

    Tabernacle implique d'informer les curieux de l'histoire des mots que, comme souvent, par exemple dans la cas de poubelle ou vespasienne, c'est un nom propre qui est à l'origine du vocable. D'après les spécialistes, aurait vécu dans les temps bibliques et au Moyen Orient un dénommé Job qui, ayant perdu le sien perdit aussi femme et enfants, et se clochardisa sur un tas de fumier. Ce n'est qu'après de nombreux envois de CV auprès des plus hautes autorités que sa situation finit par s'améliorer, style tout est bien qui finit bien : Job, après cela, vit cent quarante ans. Il voit ses fils, les fils de ses fils, quatre générations. Et Job meurt vieux, rassasié de jours. (Jb 42,17)

    Bref, ça prendra le temps que ça prendra mais on y arrivera, hommes de peu de foi !

    Je dois cependant à la vérité de signaler que dans mon Robert, le mot « job » vient après « joaillier » et avant « jobard », ce qui vous en conviendrez ne rend pas optimiste sur l'évolution de la courbe du chômage.

    Au fait, il y a dans Robert un deuxième « job » signalé comme loc.fam.vieilli (mais non, pas loqueteux famélique vieilli, faut pas avoir l'esprit mal tourné comme ça). « Monter le job à quelqu'un, lui monter la tête, l'abuser. »

     

    Aucun rapport.

     

     

  • Interprétation

    Voilà un mot qui ne parle pas pour ne rien dire, et qui de surcroît (ça va ensemble) remplit une fonction de lien, s'entremet entre plusieurs éléments, établit des correspondances, facilite la compréhension. Un mot intelligent, qui se prête avec expertise à une large utilisation.

    Rendez-vous compte, vous pouvez donner une interprétation : du rôle de Hamlet, des variations Goldberg, des résultats d'une expérience de physique, d'une radio du thorax, de relevés météorologiques, de vos rêves, lapsus et actes manqués, d'un poème hermétique, d'un haïku sibyllin reçu ce matin d'un japonais de vos amis, etc. etc.

    OK il y a un bémol bien sûr : même en supposant bonne volonté et souci de vérité, l'acte d'interprétation implique possibilité d'erreur. Erreur au revers d'interprétation, indissociables l'une de l'autre peut être. Pour Hamlet, ce n'est pas très grave. L'acteur ou le metteur qui en fait trop ou tord le texte pour faire style genre moi j'ai compris Shakespeare les mecs, c'est bien simple Hamlet n'attendait que moi pour se révéler dans toute son hamletitude : pourquoi pas ?Droit de tout un chacun (y compris moi ou même vous) à être narcissique et/ou con. Éventuellement ça peut faire rigoler, toujours ça de pris par les temps qui courent. Et puis en fait tout bien pesé, on constate qu'il y a toujours à pêcher un truc dans n'importe quelle interprétation artistique, qu'elle révèle une part de l'humanité ou de soi-même. Pour Bach pareil, d'autant plus qu'après Glenn Gould, il faut y aller, on vous y verrait. Bref l'interprétation dans le domaine artistique se ramène à la superbe phrase de Peter Brook « Il n'y a pas de problème pratique, il n'y a que des solutions esthétiques ». Idem pour l'interprétation au sens psychanalytique, où l'erreur est la règle du jeu du je. Car si on interprète Lacan interprétant Freud, le moi est paranoïaque, le ça est çapasseouçacasse et le surmoi psychorigide. Mais le tout n'est pas grave du moment qu'errare humanum est.

    En revanche le domaine scientifique ne peut se satisfaire uniquement des solutions esthétiques. La science recherche l'interprétation la plus objective possible (on sait bien qu'il est impossible qu'elle soit objective tout court). C'est pourquoi en science plus qu'ailleurs une bonne interprétation implique la coopération : se communiquer les résultats, les comparer, chercher ensemble. D'ailleurs ça ne marche pas si mal, excepté quand les lobbies mercantiles s'en mêlent. Dans interpréter il y a prêter (oui je sais pas étymologiquement mais à l'oreille et d'abord je dis ce que je veux) et eux ne connaissent que le prêt à leur intérêt exclusif. Exemple ? Les résultats des cultures transgéniques peuvent s'interpréter de bonne foi entre scientifiques. Mais pour les lobbies de l'agro alimentaire il s'agit de faire du fric en brevetant leurs semences, de jouer de l'arme de la faim, de réduire à leur dépendance des millions d'agriculteurs. Dans cette affaire la santé n'a peut être pas grand chose à craindre, en tous cas ce n'est pas sur ce point que ma paranoïa s'éveille – nobody's perfect. Mais la vérité, et la justice qui va avec, ont tout à perdre. Et ça, ça craint vraiment.