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  • Mea culpa

    J'ai encore triché décidément je suis irrécupérable, sauf à me recycler en homme politique ou entrepreneur en négociatude. Car sur l'étagère des essentiels côté latin il n'y a que ce bon vieux Gaffiot, voilà la vérité. Mais j'allègue pour ma défense la pureté de mes intentions. J'ai cherché à éviter une fastidieuse répétition. Après dico Robert dico Gaffiot vous auriez crié à l'overdose tels que je vous connais. Passons donc l'éponge voulez-vous. Mais promis, plus d'égarement désormais, tout va rentrer dans l'ordre, et d'abord alphabétique, puisque je m'en vais vous énumérer selon yceluy les livres de mon étagère des essentiels.

    La Bible. On ne présente plus.

    La Bible dévoilée(2001).Contrairement à ce que ce titre pourrait laisser accroire, il ne s'agit pas de spéculations fumeuses z'et ésotériques, mais d'archéologie biblique (titre original The Bible unearthed). Il est dû à un duo d'historiens, Israel Finkelstein et Neil Asher Silberman. Faut un peu s'accrocher par moments, car un historien, surtout archéologue, a un tel souci du détail exact assorti d'un tel tropisme reconstructeur qu'il peut passer 30 pages sur un bout de caillou qui lui permet de démontrer l'existence d'un mur d'enceinte, mur qui était le chaînon manquant pour la validation d'une hypothèse. Alors vous pensez quand ils sont deux archéologues. Après c'est trop mignon comme ils exultent pendant 30 autres pages de la chance qu'ils ont eue de tomber sur ce bout de caillou et pas un autre. Bref il s'agit dans ce livre d'une mise à plat historique sur ces nomades et agriculteurs d'il y a trois mille ans, qui ont su fabriquer, en des temps de détresse et de gloire, une récit dont la fécondité n'a cessé d'essaimer au-delà de ce peuple.

    Très instructif, il complète la lecture du précédent en étudiant comment, où, pourquoi se sont mises en place les productions mythiques, les inventions de storytelling qui ont cours dans tout texte religieux qui se respecte.

    Un travail indispensable pour ne pas lire la Bible idiots, qui n'enlève rien, au contraire, à ses intérêts anthropologique et éthique. Or ce sont bien les deux raisons pour lesquelles, que l'on soit croyant au dieu judéo-chrétien ou pas, la Bible peut revendiquer une place d'honneur au hit parade des essentiels.

     

    Le livre des psaumes (OK c'est pas l'ordre alphabétique, mais un minimum de logique s'impose). Lorsque je me suis lancée dans un commentaire de quelques uns de ces textes, comme je suis presque aussi sérieuse qu'un archéologue, j'ai jugé bon de limiter autant que possible le risque de dire des stupidités. D'où le choix du livre dans la traduction bilingue hébreu-français de Lalou et Calame chez Albin-Michel, qui m'a paru des plus fiables. Peut être qui sait si ça me prend je vous parlerai des psaumes un de ces jours. En attendant, lisez-les, vous ne perdrez pas votre temps.

     

     

     

     

  • Latin pour débutants

    « Civilisation : otium et negotium ».

    Latin pour débutants, petit livre aussi peu hâbleur que son titre, ne laisse pas de proposer d'enchanteresses découvertes en littérature et civilisation latines. Aucune ironie enchanteresses j'ai bien dit, même pour qui n'a pas eu la chance de parler le latin comme langue sienne maternelle.

    Montaigne aimait chez Jules (César) le style soldatesque qui va droit au but, et pour les mêmes raisons j'eus du temps de mes latineries scolaires un gros faible pour ses gauloisitudes, car le soldatesque aux phrases nettes m'assurait une version sans trop de prise de tête, évitant ainsi à ma copie une annotation mortifiante, Des faux sens, Attention aux contresens, et jusqu'au rédhibitoire Trop de contresens.

    Mais revenons à otium et negotium. En Latinie, les personnes distinguées n'avaient pas le souci de gagner leur vie, celle-ci étant assurée par une fortune personnelle qu'ils gardaient pour eux. C'étaient en général des héritiers de grandes familles appelées gentes. (Ex le général Jules était de la gens julia). D'autres fois ils avaient accédé à la fortune en question autrement qu'en naissant dans la gens ad hoc, par des moyens clairement immoraux mais pour le dire dans la langue de l'époque dives-divus. Ne cherchez pas dans les pages roses je viens de l'inventer, ça se traduit approximativement par rich is beautiful. D'autres n'avaient pas cette chance, le vulgum pecus, troupeau des gens qui n'appartenaient à aucune gens digne de ce nom, le peuple de Latinie d'en bas. A ne pas confondre avec le bas-latin ou le Palatin qui est un peu plus haut.

    Les premiers pouvaient passer leur temps dans l'otium. Il ne s'agissait pas d'inaction mais d'activités librement choisies et plutôt gratifiantes, art, philo, science, politique. Juste ils n'étaient pas censés en retirer du fric (ou alors discrètement par des montages financiers de sociétés écrans domiciliées dans des paradis fiscaux). En effet le couple otium-negotium n'est pas construit sur la distinction faire ou ne pas faire, mais sur vendre ou ne pas vendre. Vendre, que ce soit des choses ou de la force de travail, c'est ce que devaient faire les autres, les Latins d'en bas. Ils étaient donc obligés de renoncer à l'otium (ce que dit le mot neg-otium) pour gagner leur vie. Sinon eux aussi ils auraient fait sénateur, ou consul ou ami de Mécène, tiens ! Y a pas écrit stultus.

     

    En tous cas les uns comme les autres s'étonneraient de la permutation des signes positif et négatif entre ces deux termes et leurs descendants. Le négoce est la valeur suprême du Marché, sur laquelle s'indexent toutes les autres. Sais-tu vendre ou te vendre ? Bravo tu es un entrepreneur créateur de richesse. En revanche qui dit oisiveté sous-entend L'oisiveté est la mère de tous les vices. Phrase frappée au coin du bon sens, la preuve l'oisiveté c'est un truc de chômeur, ou d'intermittent du spectacle, ou de tout autre salaud d'assisté qui se gave indûment des richesses que le bon négoceur n'a pas pu sauver du fisc.