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  • Publicité mensongère

    « Ventre affamé n'a pas d'oreilles. »

     

    Ah bon ? Et les berceuses aux bébés affamés ? Ça marche bien, que je sache ? ...

    Euh c'est peut être pas le meilleur exemple.

    Non mais sérieusement, je me demande bien où le sens commun a entendu une telle contre-vérité.

    Car si l'on raisonne en bonne dialectique (cf ce blog 8-01-17)

     

    1)(Verre à moitié vide)

    C'est évident que la faim aiguise les perceptions.

    Ventre affamé a non seulement des oreilles, mais aussi des yeux, un nez. Tous les sens entrent en éveil dès que la faim s'installe.

    Vieil héritage de nos ancêtres chasseurs cueilleurs sans doute.

    Dans le terrain hostile du supermarché il se réactualise pour notre survie. Traquer la viande du descendant d'urus qui se camoufle sous film plastique, harponner le filet de poisson surgelé tapi au fond du bac. Repérer les zones propices à la cueillette de café par paquets, ainsi que celles où sont parqués les troupeaux de bricks à traire.

     

    2)(Verre toujours pas plein)

    Faudrait déjà s'entendre sur les mots, être logique et cohérent.

    Rapprochons ce proverbe de l'expression « avoir l'estomac dans les talons ». Qu'est-ce qu'on en déduit ?

    Ventre affamé = estomac dans les talons = place libérée pour les oreilles.

    Et donc ventre affamé a forcément de grandes oreilles (voire aussi une gorge profonde). CQFD.

     

    3)(Synthèse hégélienne rendant compte du travail de l'Esprit dans l'Histoire)

    C'est pourquoi il est déconseillé d'aller faire ses courses quand on a faim. On en a tous fait l'expérience.

    On est alors prêt à gober, inondant nos oreilles captives de consommateur, toutes les sommations à l'achat intempestif concoctées par les officines publicitaires.

     

    Conclusion. Ventre affamé a des oreilles, et aurait souvent intérêt à se les boucher.

     

     

     

     

  • A bout de souffle

     

    « Qui sème le vent récolte la tempête. »

     

    Là je n'ai qu'un mot : respect. Proverbeuses, proverbeurs, en vérité je vous le dis, rarement vous avez atteint à un telle poésie.

    Quelle métaphore épique. Digne des meilleures envolées hugoliennes. De Rimbaud l'homme aux semelles de vent.

    Vent de tempête.

    Non pas zéphyr printanier caressant le blé en herbe,

    ni légère brise venant alléger la touffeur estivale,

    mais bise hivernale aigre et radoteuse, dans son procès incessant avec les volets,

    en rafales rageuses, tramontane hystérique,

    à vous rendre fada, mistral délirant.

     

    Oui, ce proverbe a un immense pouvoir poétique.

    « Le vent qui souffle à travers la montagne m'a rendu fou. »

    Mais a-t-il raison ? (Le proverbe, parce que pour Hugo c'est sûr, un poète a toujours raison).

     

    Hors accro du cerf-volant, passionné de voile ou chargé du secteur éolien pour la transition vers les énergies renouvelables, peut être suis-je paranoïaque, mais je ne vois pas quelqu'un s'employer à semer le vent avec des intentions totalement pures.

    Sachant que tout vent est tempête potentielle (comme l'incendie est dans la flamme, l'inondation dans l'eau, le séisme dans la terre), nul semeur de vent ne peut ignorer les dégâts éventuels de son acte.

    À moins qu'il ne soit totalement stupide.

    Ou vraiment cynique.

    En tous cas aprèsmoiledélugiste.

    Car il sème le vent, mais est-il pour autant prêt à assumer la tempête ? Ben non.

    Eh oh, y a pas écrit kamikaze, hein ? Une fois son vent semé, il courra aussi sec se planquer à l'abri.

    De façon à ce que ce soient les autres et pas lui qui se prennent en pleine poire les tuiles et les pots de géranium.

    Autrement dit qui sème le vent (hors accro du cerf-volant etc.) est un méchant hypocrite, trouillard et irresponsable.

     

    Qui sème le vent, autant dire que c'est pas l'esprit de générosité spinoziste qui l'étouffe.

     

     

     

     

     

  • "Vérité en deçà"

     

    « Toute vérité n'est pas bonne à dire. »

     Je m'inscris en faux. Toute vérité est bonne à dire. Mais pas à n'importe qui ni n'importe comment.

    Oui c'est exactement comme l'humour. D'ailleurs ...

     

    « Faudrait pas d'abord répondre à la question qu'est-ce que la vérité ? » demandera le lecteur avide de philosopher.

    Réponse : non.

    « Et pourquoi pas ? »

    Un proverbe ne se pose pas ce genre de questions. Ni aucune question à vrai dire. Le proverbe ignore superbement la forme interrogative. Il fait dans l'assertion sans nuances, l'affirmation massive autant que gratuite.

    Alors pourquoi être plus royaliste que le roi ? Comme on dit.

    « Oui mais » ergotera le lecteur toujours autant de philosopher avide « maintenant qu'on est en démocratie ? »

    OK. Rien à redire . Philosophons donc à vide, puisque c'est notre droit de l'homme.

     

    « Toute vérité n'est pas bonne à dire » ne se complète pas nécessairement de « alors on ferme sa gueule », comme si ...

    « Ah quand même ! » s'immiscera encore le lecteur avec un brin de satisfaction.

    Comme s'il n'y avait qu'une vérité. Mais si on dit « Toute vérité n'est pas bonne à dire. Mais y en a des que si », on développe l'idée implicite que la vérité est multiforme, plurielle, relative.

    Il y a des vérités. Quatre parfois, souvent bien plus.

     

    Et du coup, (pense ce proverbe) on peut hésiter à les balancer. Vu que la vérité de l'un ne sera pas celle de l'autre.

    Celui à qui je dis ce que je pense être une vérité ne l'entendra pas toujours, de même que je resterai souvent sourde à sa vérité à lui. Car la vérité est dans le mi-dire (dixit Lacan).

    Traduction : hors d'un rancard des interlocuteurs en terrain symbolique neutre, aucune vérité se pointera non plus.

     

    Depuis ce no man's land, donc, je m'inscris en faux contre ce proverbe. Toute vérité est bonne à dire. Voilà.

    1) Pas forcément toute au sens d'entièrement. Ni toute d'un coup. On peut laisser du temps au temps. Laisser du mou, du flou pourquoi pas. Laisser entendre, suggérer, plutôt qu'asséner.

    2) Toute réponse ou réaction doit être entendue comme une autre vérité potentielle. Ce qui n'empêche pas de poursuivre le débat. Au contraire.

    3) Même si elle est difficile à dire, même si elle a du mal à passer (dans la bouche qui la dit, l'oreille qui l'entend), une vérité ne fera jamais autant de dégâts que le non-dit.