Comme dit notre cousine Germaine (non pas Angela M. Quoique.)
« le bien ou le mal que l'on peut faire aux autres hommes par telle ou telle action, c'est sur ce fondement que tous ont intérêt au sacrifice de chacun, et qu'on retrouve, comme dans le tribut de l'impôt, le prix de son dévouement particulier dans la part de protection qu'assure l'ordre général. »
(G de Staël. De la bienfaisance)
Pas faux, non ? Par exemple au hasard le dévouement consistant à se faire vacciner ne me paraît pas exorbitant. Bizarrement, j'y vois l'immense chance d'accéder à la protection de tous, grâce à une merveille scientifique. Et gratuitement.
Mais bon je dis ça je dis rien.
Toujours est-il que le premier jour où je suis sortie après avoir reçu mes deux doses de vaccin, au début du printemps, je me souviens que je marchais dans une étrange euphorie. Je me sentais comme investie d'une énergie, d'une force, que j'avais besoin de partager. En fait, autant que protégée, je me sentais protectrice.
Il m'est venu cette formulation : je suis une barrière à virus. Je l'adressais mentalement à tous les passants croisés. « Ouh ouh regardez par ici : la petite dame, oui, là, c'est pas une force de la nature, vous diriez ? Ah ah détrompez-vous car telle que vous me voyez je suis une barrière à virus. »
Et alors je me suis souvenue des spots télé du ministère de la santé dans les années 80. Des jeunes gens des jeunes filles cassaient d'un geste décidé une ligne se terminant en flèche (censée représentée j'imagine la montée en flèche de la contamination) en proclamant fièrement : le sida ne passera pas par moi.
D'un virus l'autre, me dis-je. Sauf que pour notre petit dernier on a la chance d'avoir l'arme du vaccin.
Et j'en souris d'aise sous mon masque.
À défaut de rire sous une cape de superwoman.