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Blog - Page 101

  • Pourquoi pas

    « n°163 : Après une grande victoire.

    Ce qu'il y a de meilleur dans une grande victoire, c'est qu'elle ôte au vainqueur la peur d'une défaite. ''Pourquoi ne pas perdre une fois également ? – se dit-il : je suis désormais assez riche pour cela.''»

    (Friedrich Nietzsche Le Gai Savoir Troisième livre)

     

    Autrement dit la victoire donnerait une marge pour la suite du jeu. On pourrait se payer le luxe du risque. C'est peut être vrai avec des gens qui sont vraiment joueurs.

    Mais il y a aussi nombre de vainqueurs qui restent des gagne-petit, soucieux de convertir leur victoire en rente, incapables de se dire qu'après tout la victoire ne perd rien à se partager. Des vainqueurs sans noblesse, sans ce panache que confère la générosité.

     

  • Avec la distance

    « n°162 : Égoïsme.

    L'égoïsme est la loi perspectiviste de la sensation en vertu de laquelle ce qui est le plus proche apparaît grand et lourd : tandis qu'avec la distance, toutes les choses perdent de leur grandeur et de leur poids. »

    (Friedrich Nietzsche Le Gai Savoir Troisième livre)

     

    Une définition que ne renieraient pas un Jules Renard, un Flaubert, ou encore la plupart des moralistes.

    En tous cas oui la distance est un critère évident. Une distance dans l'espace ou dans le temps.

    On en voit un remarquable exemple avec la guerre en Ukraine. Nous sommes, à juste titre, abasourdis, indignés, angoissés, de cette guerre si proche, ravivant tant de traumatismes européens, dont certains encore récents, comme la guerre des Balkans. 

    Mais la loi perspectiviste relègue au second plan, et même en fond de décor, toutes les autres guerres qui saignent le monde, tout autant absurdes et obscènes : Yémen, Afghanistan, Mali, Kivu, et, encore plus en arrière-fond, les guerres endémiques au Proche-Orient, ou celles menées par les cartels de la drogue en Amérique latine ...

     

  • La vertu d'une autre époque

    « n°159 : Toute vertu a son heure.

    À celui qui est intransigeant, sa probité fait souvent éprouver des remords : car l'intransigeance est la vertu d'une autre époque que la probité. »

    (Friedrich Nietzsche Le Gai Savoir Troisième livre)

     

    D'une autre époque oui et non. Au plan historique intransigeance et probité sont toujours nécessairement contemporaines, mais c'est vrai que le plus souvent chacune aimerait mieux ignorer l'autre. (Enfin c'est surtout l'intransigeance qui aimerait ignorer la probité).

    Plus directement et plus concrètement, par autre époque j'entends autre époque de la vie.

    Il me semble que la jeunesse considère généralement l'intransigeance comme une vertu (l'intransigeance envers autrui s'entend, envers soi-même à tout âge c'est une autre histoire).

    Et puis, en avançant dans la vie, on s'aperçoit que c'est plus compliqué.

    On comprend, puis l'on s'avoue, que l'intransigeance n'est pas toujours aussi pure qu'il y paraît, qu'elle peut cacher beaucoup de choses, justifier bien des alibis.

    Alors on commence à mesurer la valeur de la probité. Vertu un peu terne, vertu minimale, certes, mais c'est ce qui fait sa noblesse et son efficacité.

    Car elle est vertu d'après les certitudes, les exigences, les illusions.

    Elle est la vertu de l'accueil des choses comme elles sont, des êtres comme ils sont, la vertu de l'acceptation des conditions de la vie.

    Ou pour le dire plus simplement, elle est la vertu qui consiste à arrêter de (se) raconter des histoires.

    Bon je ne dis pas que ce soit automatiquement acquis grâce au vieillissement, ce serait trop beau. Mais c'est juste que la prise de conscience de plus en plus aiguë de la fragilité et de la relativité des choses peut aider il me semble à progresser en probité.