Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Blog - Page 279

  • La probité les lumières l'expérience

    Il y a trois sortes d'Aristocratie ; naturelle, élective, héréditaire. La première ne convient qu'à des peuples simples ; le troisième est le pire de tous les Gouvernements. Le deuxième est le meilleur : c'est l'Aristocratie proprement dite.

    (III,5 De l'Aristocratie)

     

    L'aristocratie élective définie par Rousseau a pour intérêt de permettre une représentation alliant justice, rationalité et efficacité.

    Elle est ce qui s'approche le mieux de la solution (si peu évidente a priori) au problème du rapport le plus avantageux entre entre citoyens et sujets, entre Souverain (le peuple du contrat) et Prince (le gouvernement qu'il se donne) :

    Outre l'avantage de la distinction des deux pouvoirs (exécutif, législatif) elle a celui du choix de ses membres ;

    car dans le Gouvernement populaire (la démocratie) tous les citoyens naissent magistrats (administrateurs de la nation), mais celui-ci (l'aristocratie élective) les borne à un petit nombre, et ils ne le deviennent que par élection ;

    moyen par lequel la probité, les lumières, l'expérience, et toutes les autres raisons de préférence et d'estime publique, sont autant de nouveaux garants qu'on sera sagement gouverné.

     

    Autrement dit pour Rousseau cette aristocratie élective c'est les avantages de la démocratie sans ses inconvénients.

    À condition que les représentants soient vraiment désignés selon des procédures démocratiques et des critères rationnels.

    Cela est bel et bon, mais il y a juste un petit hic : encore faut-il en trouver, de ces citoyen(ne)s présentant la magnifique conjonction probité lumières expérience. La conjonction de l'éthique du bien commun et de la compétence à le discerner et le mettre en œuvre.

    Des qualités indispensables, mais qui ne sont innées pour personne. Elles peuvent (et doivent) s'acquérir par l'étude, l'éducation, la formation.

    Reste une question (oh une broutille) : savoir où, comment, avec qui ?

    L'occasion de se souvenir que c'était l'idée qui avait présidé à la création de l'ENA au sortir de la deuxième guerre mondiale.

    Sic transit hein ?

    Mais bon, ce n'est pas une raison pour tout laisser tomber. Plus que jamais il faut chercher les moyens de formation à la démocratie et au sens du bien collectif.

    Il y a, vu la complexité des sociétés, les éléments qui nécessitent savoirs précis et techniques élaborées. Tous les citoyens ne peuvent les aborder (encore qu'on puisse souvent plus expliquer qu'on ne croit) (qu'on ne veut ?)

    Mais il y a aussi, à la portée de tous, les choses simples, évidentes, qui ne demandent qu'un certain respect de la vérité et de la différence : n'accorder crédit qu'à une information plurielle précise vérifiée, admettre la divergence des points de vue etc.

    En cela nous pouvons tous être des aristocrates.

     

     

     

     

  • Dans la rigueur de l'acception

    À prendre le terme dans la rigueur de l'acception, il n'a jamais existé de véritable Démocratie, et il n'en existera jamais.

    (III,4 De la Démocratie)

    Déjà pour une bonne raison : les citoyens ne peuvent pas rester tout le temps assemblés, car il faut bien travailler pour assurer sa subsistance. (Sans compter qu'ils peuvent de temps en temps avoir envie de faire autre chose que de la politique). Les assemblées plénières ne peuvent être que périodiques.

    Entre deux assemblées, il faut donc déléguer d'une part l'administration des affaires courantes à des représentants chargés de l'exécutif. D'autre part certaines prises de décision à des représentants chargés du législatif.

    Conclusion sauf sur un tout petit territoire habité par des rentiers, la représentation est donc nécessairement corrélative de la démocratie.

     

    Reste à construire un système de représentation le plus juste possible. L'occasion de positiver un peu (c'est pas si souvent dans cette lecture). Depuis l'aube de la démocratie, on a fait quelques progrès.

    On a (lentement et imparfaitement, mais bon) renoncé aux discriminations de sexe ou de fortune. On a multiplié les instances de représentation, au plan territorial par exemple. On a affiné principes, mécanismes, périodicité de la désignation des représentants.

     

    Mais alors pourquoi ça coince ? Pourquoi la crise de la démocratie représentative ? Toutes ces conditions ne sauraient subsister sans la vertu, dit Rousseau. Celle de chacun des membres du corps social bien sûr, et en particulier de ceux qui ont le plus de pouvoir sur le bien public.

    La démocratie est ainsi malade de l'incompétence et/ou malhonnêteté, du manque de sens du bien commun qui sont le fait d'un certain nombre des représentants, plus attachés à leur rente de situation (en termes matériels et surtout symboliques) qu'à travailler à la bonne marche du pays avec et pour leurs concitoyens.

    Ils ne sont probablement pas la majorité, mais ils sont suffisamment nombreux et visibles pour provoquer le rejet de l'ensemble du système. C'est la menace par défaut de démocratie (résultant des défauts des politiciens).

     

    Mais le rejet de la représentation provient tout autant d'une revendication démocratique que l'on peut qualifier de par excès. L'idée que toute médiation amène la déperdition d'une volonté populaire qui ne serait « authentique » qu'en étant immédiate.

    Aujourd'hui cette immédiateté (entretenue par la gafalisation de nos sociétés) est peut être le pire ennemi de la démocratie, par le rejet de la médiation temporelle, spatiale, structurelle.

     

    Il n'y a pas de Gouvernement si sujet aux guerres civiles et aux agitations intestines que le Démocratique ou populaire, parce qu'il n'y en a aucun qui tende si fortement et si continuellement à changer de forme, ni qui demande plus de courage et de vigilance pour être maintenu dans la sienne.

  • La multitude des circonstances

    Poursuivant l'analyse, Rousseau distingue classiquement trois formes de gouvernement.

    Le Souverain peut commettre le dépôt du Gouvernement à tout le peuple ou la plus grande partie du peuple. On donne à cette forme de Gouvernement le nom de Démocratie.

    Ou bien il peut resserrer le Gouvernement entre les mains d'un petit nombre, et cette forme porte le nom d'Aristocratie.

    Enfin il peut concentrer tout le Gouvernement dans les mains d'un magistrat unique dont tous les autres tiennent leur pouvoir. Cette troisième forme s'appelle Monarchie.

    (III,3 Division des Gouvernements)

     

    Le bon gouvernement nécessitant une bonne proportion entre droit et force, Rousseau fait intervenir le paramètre numérique. Le meilleur gouvernement pour un État donné sera le mieux adapté à sa quantité de population.

    Il s'ensuit que le Gouvernement Démocratique convient aux petits États, l'Aristocratique aux médiocres (moyens) et le Monarchique aux grands. Cette règle se tire immédiatement du principe ; mais comment compter la multitude de circonstances qui peuvent fournir des exceptions ?

     

    Et par conséquent il peut résulter de ces trois formes combinées une multitude de formes mixtes.

    La question est de trouver la meilleure combinaison possible, celle qui infuse au mieux l'idéal dans la réalité. Le suspense n'est pas grand. Pour la trouver et la formuler j'entends, parce que pour la faire vivre, c'est une autre paire de manches.