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Blog - Page 450

  • ça va sans dire

    « Votre amour du prochain n'est que votre mauvais amour pour vous-mêmes (...) L'un va auprès de son prochain parce qu'il se cherche lui-même, un autre parce qu'il aimerait se perdre. »

    (Ainsi parlait Zarathoustra De l'amour du prochain)

     

    Après les difficultés du couple prochain et lointain, voici les embrouilles du couple prochain et moi. Après Marx (Karl autant que Groucho), voici venir Freud. Je crains qu'on ne se soit fait refiler une carte de membre du club des LAF (lucides à fond), vous savez celui qui a fusionné avec le club des PMPD (pessimistes mais pas désespérés). Une carte qui peut nous valoir un certain prestige dans quelques cercles restreints, tel le club des PI (penseurs invétérés).

    Mais surtout pas mal d'occasions de prise de tête. Vous savez ce que c'est : la carte est gratuite, on se méfie pas, résultat on paie 6 fois plus cher pour obtenir en prétendu cadeau un truc qu'on n'aurait pas eu l'idée d'acheter vu qu'on n'en a pas besoin et qu'en plus c'est pas beau. Euh là je me laisse entraîner par mon anticonsumérisme primaire, honte à moi. Ce qui ne m'a pas empêchée dans ma métaphore, remarquez, de mettre à votre disposition deux cartes en une : vous ne viendrez plus dans ce blog par hasard !

     

    Bref vous l'aurez compris aujourd'hui la prise de tête ne me dit rien (qui a dit c'est pas trop tôt ?) On va donc faire du vite fait bien fait. Oui l'idéal serait d'aimer le prochain sans attendre de retour narcissique sur investissement. Encore oui on est mal parti si on cherche à se fuir en passant par le prochain. Peu de chance qu'on se retrouve dans le haut de gamme du rayon éthique. Mais on s'en moque notre rayon c'est l'arc-en-ciel cf note du 19-11. (Facile je sais, mais trop tentant. Et puis j'ai des points à gagner sur ma carte du club des RAL - raisonneurs absolument loufoques).

    Bref la vraie question reste quand même de savoir ce que ça lui fait à lui, au prochain. J'aurais tendance à dire comme ça vite fait qu'un bon amour est celui qui fait du bien. Un peu ou beaucoup, le bien qu'il peut. Et seul lui, le prochain, peut dire ce que lui fait notre amour. Donc il n'y a qu'à lui laisser la parole, la liberté de dire ceci me fait du bien, ceci me fait du mal : voilà un bon début dans l'amour. En somme ne pas faire ainsi :

    « Vous convoquez un témoin quand vous voulez dire du bien de vous ; et quand vous l'avez induit à bien penser de vous, alors vous-mêmes pensez du bien de vous. »

    1) un bon moyen de ne pas convoquer l'autre en témoin : ne pas se poser en juge de soi (ni de lui a fortiori)

    2) penser de soi tout le bien qu'on (se) veut : oui, ça ne mange pas de pain

    3) quant à en dire du bien, laissons ce soin au prochain : rien ne lui fera plus plaisir ...

     

     

  • Le club des cinq

    « Ce sont les plus lointains qui paient pour votre amour du prochain ; et dès que vous êtes cinq réunis, il faut qu'il y ait quelque part un sixième qui meure. »

    (Ainsi parlait Zarathoustra. De l'amour du prochain)

     

    Terrible phrase, qui sonne comme une sentence. Phrase dont l'amertume glace le cœur. Phrase qu'on voudrait croire fausse, qu'on voudrait rapporter à la sensibilité d'écorché vif de Monsieur Nietzsche, à sa pente paranoïaque. L'ennui c'est qu'elle est vraie. En tout cas amplement vérifiée. Racismes, exclusions, bêtise et abjection. Boucs émissaires. Des autres trop autres (ou trop peu ?) désignés pour l'humiliation, le massacre. Fétichisme de la « proximité » ethnique, idéologique, religieuse : boue à cimenter les pires associations.

     

    Bref ce genre de club des cinq incite irrésistiblement à dire avec Groucho Marx « je n'accepterais pas de faire partie d'un club qui m'admettrait parmi ses membres ». En revanche la place du sixième exclu mérite une toute autre considération. Elle est celle de la demande d'asile contre l'inhumain. Et par conséquent celle qui en appelle à l'effort surhumain vers la générosité humaine. La générosité (je parle toujours du sens fort et précis que lui donne Spinoza), elle qui sait surmonter le prochain et voir qu'il forme avec le lointain le même corps, le même être.

    « L'avenir, le lointain, qu'ils soient la cause de ton aujourd'hui : en ton ami tu aimeras le surhumain qui est cause de toi.»

     

    Un peu dense quand même comme formulation, compact, minéral, non ? Que voulez-vous, c'est le côté diamant brut que prend parfois le style de Nietzsche. Un peu gros caillou, mais toujours de si belle eau.

     

    A part ça je parie que vous aussi vous vous demandez : pourquoi 5 (et pas 3 ou G8 ou G20) ? Va savoir. Qu'est-ce qui est 5 ? Les 5 doigts de la main ? Les 5 sens ? Les 5 continents ?

     

     

     

     

     

     

     

     

  • Petits joueurs

    « La femme n'est pas encore capable d'amitié. Mais dites-moi, vous les hommes (Männer), qui d'entre vous est donc capable d'amitié ? »

    (Ainsi parlait Zarathoustra De l'ami)

     

    C'est la phrase suivante dans le texte. Et on est bien contente de la trouver.

    Mais pas si étonnée finalement. C'est Nietzsche quand même, le genre de mec dont le trip était de penser plutôt que de se saouler à la bière devant un match de foot truqué. Un match de foot, quoi. (Cela dit la bière il ne devait pas cracher dessus non plus). Mais on est un peu moins contente en réalisant : si l'humanité est à ce point incapable d'amitié, femme ou homme, Mann und Weib, Célimène ou Alceste, reste-t-il donc comme seule option raisonnable la misanthropie ?

     

    « Es-tu esclave, tu ne pourras être ami. Es-tu tyran ? Tu ne pourras avoir d'amis. » Donc tout n'est pas perdu. Car de ces mots on déduira que l'amitié n'est pas inaccessible à condition d'échapper à l'alternative tyran ou esclave. Bon OK c'est pas gagné. Mais pourquoi déclarer forfait d'emblée ? Battons-nous un peu, que diable !

    Ni tyran ni esclave, en récusant l'alternative pouvoir-soumission, pose par le fait-même deux valeurs : la liberté et l'égalité. Il appartient aux candidats-amis à la fois de les revendiquer pour soi et de les permettre à l'autre.

    C'est certes difficile, cela implique davantage qu'une sympathie spontanée ou autres affinités électives. L'amitié selon Nietzsche ce n'est pas pour les petits joueurs, faut pouvoir. Mais attention aux contrefaçons, le pouvoir n'est pas ce qu'on croit. Accepter d'être esclave ou se vouloir tyran, c'est en fait la même chose. Car être moins ou être plus signent la même impuissance à être totalement, c'est à dire être-avec.

     

    L'amitié nietzschéenne est ainsi la sœur jumelle de la générosité spinoziste. La générosité d'une certaine façon « surmonte » l'homme. Car elle conçoit chaque individu comme indissociable de l'ensemble, de l'humanité entière.

     

    « La camaraderie, il y en a : puisse-t-il y avoir de l'amitié ! »

    Ne pas rester des petits joueurs, ne pas se cantonner à l'entre soi, qu'on soit supporters de foot, philosophes, bobos, babas, prolos, ceci, cela. L'entre soi d'un groupe d'appartenance où fatalement on finira par penser : « les autres du dehors, rien à foutre » (version soft) ou même : « les autres du dehors qu'ils crèvent » (version hard).