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Le blog d'Ariane Beth - Page 324

  • Soft Wilde

    Ce sont les gens imparfaits, et non les parfaits, qui ont besoin d'amour.

    Oscar Wilde (Un mari idéal)

     

    Arrêtez-moi si je dis une connerie, mais il me semble que tout le monde (et n'importe qui) a besoin d'amour.

    Moi par exemple au hasard, qui sans me vanter suis absolument parfaite, eh bien Dieu me câline, j'ai autant besoin d'amour que des carrément imparfaits comme …

    (Ben non je vais pas balancer, étant parfaite je suis pas médisante) (Mais j'en pense pas moins, étant parfaite je suis lucide).

    Et surtout étant parfaite, je sais bien que parfait, imparfait, ça ne veut rien dire (à mon humble avis Oscar le savait aussi). Par réalité et perfection j'entends la même chose, comme dit Spinoza (arrêtez-moi si je radote).

    En revanche on peut toujours poser la question : c'est quoi l'amour ?

    On peut dire bien des choses en somme. Pour moi au point où j'en suis tout bien pesé je dirais qu'il est consolateur.

    Au sens premier : consoler quelqu'un c'est lui être présent, ne pas le laisser seul (même si l'on ne peut rien pour l'aider). Ainsi être aimé rassure. Et par là incite à la confiance, à l'ouverture, à la tolérance.

    Bref l'amour conforte dans un narcissisme positif, défend contre le ressentiment. Conséquence : l'amour rend optimiste, le manque d'amour pessimiste.

    D'où le cercle vertueux : l'optimiste aura tendance à transmettre l'amour qui l'a fait optimiste. Il pensera qu'aimer les gens peut les faire progresser vers le bien. Peut être est-ce le sens de la phrase de Wilde.

    Inversement le pessimiste soutiendra que trop aimer les gens aboutit à les gâter comme on dit. Et alors même s'ils sont pas trop mal au départ ils risquent d'empirer.

    Au point où j'en suis tout bien pesé, je pense qu'aimer est moins risqué pour soi et moins dangereux pour autrui que ne pas aimer. Mais ça n'engage que moi, vous pouvez m'arrêter si je dis une connerie.

    Pour finir vous aurez noté que j'ai fait l'impasse sur la fameuse distinction Eros Philia Agapê (en gros : passion sensuelle, amitié tendre, don absolu).

    Au point où j'en suis tout bien pesé je doute de sa pertinence. En tous cas si différence il y a, ce n'est pas sur un mode statique et exclusif.

    On pourrait dire (tiens oui je vais dire ça) que tout amour est une synthèse dynamique et continuelle de ces trois-là.

     

     

     

  • Roman de gare

    Je ne voyage jamais sans mon journal intime. Il faut toujours avoir quelque chose de sensationnel à lire dans le train.

    Oscar Wilde (De l'importance d'être Constant)

     

    Moi c'est une chose que je fais rarement. En fait je prends très peu le train.

    Cependant cette phrase me renvoie à maintes errances en librairie ou bibliothèque, et à leurs présentoirs surchargés de vanités.

    Entre les auteurs qui refont toujours le même livre (soit qu'ils ne sachent pas faire autrement, n'aient décidément rien d'autre à dire, soit que leurs éditeurs rentabilisent le filon), ceux qui formatent leur sujet pour être dans le créneau vendeur actuel (supposé), avec une indigence d'idées et un conformisme de style (ou l'inverse) tout sauf improbables, que de fois suis-je renvoyée de Charybde en Scylla, prenant un volume sur la foi d'un titre accrocheur, lisant une page ici ou là, la 4° de couverture … Et puis quoi ? Bof.

    La plupart sont trop longs à mes yeux. Ce n'est pas une question de nombre de pages. Je crois que je peine à les lire parce que je les ressens comme lourds, boursouflés d'inutilités. Fades, pas nourrissants et indigestes à la fois.

     

    OK, mais qui es-tu, toi, pour juger ainsi ? (ne m'enverra pas dire le lecteur), es-tu si contente de tes propres écrits pour t'autoriser tant de morgue ?

    (Dieu me supervise, y a des jours mon lecteur il parle comme mon Surmoi).

    « Ach, Ariane, Ich suis obligé de dire que votre Leser a raison sur ce coup-là. Und Ich ajoutiererais même : es serait pas par hasard eine grosse jalousie envers alle ces Autoren ? Peut être sie écrivent nicht genialischement, mais ils trouvent toujours des Editoren pour les publieren, eux … Nicht wahr hein ? »

    Papa Freud, vous avez vu juste comme toujours. Mais vous savez ce que c'est : on écrit, on aimerait être lu. C'est humain, non ?

    Bref tout ça pour dire y a des jours je le comprends, Oscar (toutes choses égales par ailleurs).

     

    Mais je me console : ceux qui m'aiment me liront dans le train.

     

     

     

     

  • Jardinage

    Chacun de nous devrait tenir le journal intime de quelqu'un d'autre.

    Oscar Wilde (Dans la conversation)

     

    C'est vrai, ça. J'y avais jamais pensé, mais quelle super bonne idée. Si bonne que je n'arrive pas à comprendre pourquoi je ne l'ai pas eue.

    En l'absence de contexte à cette phrase, je ne sais pas trop sous quel angle exactement Oscar envisage la chose. En gros je vois deux cas de figure.

     

    a) Chacun de nous et quelqu'un d'autre se rapportent à un cercle restreint, celui par exemple du salon où ces propos sont tenus.

    L'exercice aura des chances de tourner à une variation raffinée (ou pas) d'une sorte de « jeu de la vérité ». Il sera ainsi un moyen élégant (ou pas) de se payer sur le dos de ses « amis » une lichette de médisance, ou, l'air de rien, une bonne tranche de calomnie, aussi délectable que celle du cake accompagnant le cloudy tea.

    On ne peut exclure que Wilde ait vu (voire pratiqué) la chose ainsi. Mais on ne peut exclure non plus qu'il ait envisagé l'autre cas de figure.

     

    b) Chacun de nous et quelqu'un d'autre peuvent s'entendre dans l'acception la plus large, et nous désigner en tant qu'êtres humains.

    La phrase nous entraîne alors dans le champ moral. Loin de l'entre-soi des salons et ses mesquineries. (Quoique : le champ moral traverse un salon aussi bien que tout autre lieu).

    Vue sous cet angle, la proposition rejoint ce que les Stoïciens, comme d'autres avant eux et après, nommaient exercice spirituel. (Exemple le livre éponyme d'Ignace de Loyola, fondateur des Jésuites)

    Une gymnastique de l'esprit, à visée philosophique et morale, sur le modèle d'une gymnastique physique.

    Il s'agit ici d'atteindre la souplesse mentale nécessaire à se glisser dans la peau de l'autre, pour en épouser les pensées et sentiments. Un bel exercice de décentrement, d'ouverture, d'empathie.

    Un exercice de dépaysement, qui arrachera le narcisse à son jardin secret pour le transplanter dans le jardin secret d'un autre.