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Blog - Page 207

  • (6/12) Episode emergency

    Résumé : le premier volet de notre triptyque lexical nous a fait rencontrer ce virus. Le deuxième volet nous a mis au fait dudela covid 19. Que va nous révéler le troisième volet de cette passionnante série ?

     

    Nommons maintenant les événements auxquels le virus donne lieu.

    Cela commence par l'épidémie. Qu'est-ce qu'une épidémie au fond ? Un jeu de furet (ou pangolin ? oui si vous voulez), il est passé par ici, il repassera par là, qui l'a.

    Il va il vient, de l'épidémie (il rôde dans les alentours, à nos confins) à la pandémie (il s'aventure partout sur notre bonne vieille terre), puis de la pandémie à l'endémie prévisible (il va taper l'incruste pour longtemps), sur le modèle de l'épidémie de grippe de 1916-18 reconvertie depuis en grippe dite saisonnière.

     

    L'épidémie a provoqué ladite crise sanitaire.

    Soignants au bord de la crise de nerfs dans les hôpitaux débordés par l'afflux, aux urgences, de cas vraiment urgents (bon côté des choses on a arrêté d'aller aux urgences pour ne pas avancer le prix de la consultation, ou parce qu'on a vu de la lumière).

    Poussée de fièvre sur un organisme hospitalier déjà bien affaibli depuis longtemps pour cause de gestion absurdement comptable, assortie d'une hypertrophie d'organismes d'encadrement administratif, parasitant le système au détriment des soignants et patients, coûtant cher pour une utilité réduite (à l'exact inverse donc des soignants).

    Cette pathologie de pléthore administrative atteint d'ailleurs de même l'éducation nationale, au détriment de la présence d'enseignants et encadrants sur le terrain

    (et sans doute c'est pareil dans d'autres corps de fonctionnaires - je parle des deux que je connais de près)

    (bon, ça, c'est fait).

    Réformateurs intelligents (j'espère que ça peut ne pas être un oxymore), au boulot !

     

    L'autre crise, la crise économique induite, elle est devant nous. Ça fait peur, alors en bonne phobique, j'évite le sujet (de toutes façons je n'y connais pas grand chose).

     

    En fait à la place de crise je dirais bien épisode. Un épisode d'un feuilleton, d'une série comme on dit aujourd'hui. Or si l'on sait une chose, c'est que la série « Épidémie(s) » n'est pas finie.

    Et puis épisode est un mot de la tragédie grecque. Partie du drame entre deux entrées dit Robert. Moment donc où l'effectif reste constant en scène (comme dans le plateau d'une épidémie).

    Pour moi j'entends épisode sur le mode : quelque chose qui arrive, comme tant de choses arrivent, sont au centre un temps, puis passent. Et arrive l'épisode suivant. C'est comme ça, voilà tout.

    Style Qohèlet l'ecclésiaste : « un temps avec virus, un temps sans virus, il y a un temps pour tout ». Et vanitas vanitatum.

    Soit dit sans casser l'ambiance.

     

  • (5/12) Millésime académique

    Pour ce qui est de la nomination de la maladie, le terme le plus fréquent est covid 19, c'est à dire corona virus disease 2019. Une maladie provoquée par un coronavirus né en l'an de grâce 2019.

     

    Les optimistes, qui voient toujours le verre à moitié plein, trouveront au terme un côté festif, avec son évocation subliminale du millésime d'un grand cru.

    « Alors, ce covid 19, qu'est-ce que vous en dites ?

    - Long en bouche, nez puissant, ample diffusion des arômes, présent, corsé : on peut anticiper une bonne garde. Mais un peu âpre, un peu trop tannant, euh tannique ... »

     

    Les pessimistes écriront covide, accusant la rime avec verre à moitié vide. Difficile de leur donner tort, non ?

    (Le pessimisme, malheureusement, a souvent plus d'arguments rationnels à faire valoir que l'optimisme, c'est triste mais c'est ainsi).

     

    Certains disent juste le covid. Sauf que.

    Les personnes à risque de l'Académie Française, qui apparemment n'avaient rien de mieux à faire de leur confinement, ou pour courir après l'actualité, genre on est dans le mouv' les gars (histoire de s'inscrire en faux contre la réputation naphtalinesque qui leur colle au bicorne), ont décrété qu'il fallait dire la covid.

    J'avoue ne pas avoir approfondi leur argumentation. Même aux heures les plus lourdes du confinement je n'ai pas déprimé au point de n'avoir pour échappatoire que d'éplucher les minutes de leurs réunions virtuelles.

    Mais en gros l'argument pour le féminin c'est que disease se traduit par une maladie. Sauf que : la peste mais le choléra, la dengue mais le chikungunya : va choisir …

     

    Maintenant faudrait une étude pour voir si ceux qui disent la c'est parce qu'ils sont convaincus par nos vénérables bicornés.

    Ou juste pour leur faire plaisir, comme quand, à la fin du repas, tout le monde feint de s'intéresser à l'histoire que Pépé a déjà radotée tout pareil au précédent repas de famille.

     

    Perso je n'ai pas d'état d'âme philologique à dire le covid, tout simplement car c'est la coutume depuis les premières épidémies de ces coronavirus.

    Et, comme dit fort justement Montaigne*, suivre une coutume (à condition qu'elle ne soit dommageable à personne évidemment), ça ne mange pas de pain.

     

    * Oui je sais lecteur, moi aussi je radote. La faute à mon âge académique, sans doute.

  • (4/12) Une couronne à Stockholm

    Quel mot pour dire cette aventure : confinement ? confinement/déconfinement ? épisode covid ? Je dirais bien juste tout ça. Mais la paresse locutoire ne passera pas par nous, ô lecteur-trice : tentons de nommer ce ça.

    Commençons par remarquer qu'il y a trois choses différentes enchaînées. Le virus, la maladie qui en découle, les situations qui découlent de la maladie.

     

    Premièrement donc : nommer le virus soi-même.

    « Coronavirus » ? Trop ou trop peu. C'est un coronavirus certes, mais ils sont nombreux dans la famille, faut donc préciser. Il s'agit d'un SARS coronavirus.

    Mais dans la branche SARS aussi ils sont quelques-uns. L'épidémie de 2003 en Asie fut le fait d'un nommé SARS CoV. D'où le nom exact du deuxième de la dynastie, SARS CoV-2.

    On n'a pas nommé le premier directement CoV-1, malgré les fortes probabilités qu'il ait une descendance sans trop tarder : superstition je gage (la superstition n'épargne pas l'esprit scientifique).

    Cela étant, SARS CoV-2, nom le plus exact mais pas franchement rock'n roll, n'a pas séduit grand monde sur les ondes et sous les cieux.

    Le mot plébiscité reste coronavirus. Il sonne bien, et ceux qui n'ont pas taillé les cours de latin y entendent le mot couronne. Ça fait riche.

     

    D'autres disent corona. Moins par latinisme que par habitude de l'apocope du parler contemporain : gagnons du temps et faisons cool. Ça fait surtout penser à la marque de bière. (C'est peut être pour ça en fait ?)

     

    D'autres encore, des épidémiologistes, des spécialistes, disent nouveau coronavirus : façon discrète de laisser entendre qu'ils savent qu'il y en a eu d'autres, mais ne veulent pas étaler leur savoir.

    Ils emploient peu SARS CoV-2 : c'est vrai que cette suite rebutante de lettres et chiffres fait formulaire de sécu, d'administration fiscale (ou ogive nucléaire cf ce blog Du virus 3/8 11 mai 2020).

     

    Moi ? (Merci de poser la question, lecteur). Dire SARS CoV-2 satisferait mon souci scrupuleux de précision. Mais j'évite, crainte de passer pour une frimeuse. Résultat j'en reste à virus tout court.

    Reste la question du déterminant.

    Dire le virus lui donne un statut vraiment disproportionné, en fait un symbole, le mythifie, le déifie quasiment. Alors je dis ce virus. Façon de le relativiser, de le remettre à sa place. Il y aussi là quelque chose de mobilisateur. Ce virus ici maintenant auquel nous avons à faire face.

     

    Dans le même ordre d'idée, on pourrait presque dire notre virus. Mais non : trop gentil, trop familier. D'accord on n'a pas le choix de s'habituer à sa présence, d'avoir à le fréquenter, ou plutôt à s'efforcer de le tenir à distance, pendant de longs mois encore.

    Mais ce n'est pas une raison pour se laisser gagner par le syndrome de Stockholm.