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Le blog d'Ariane Beth - Page 254

  • Et réciproquement

    « Il est ridicule de ne pas vouloir éviter sa propre méchanceté – alors que c'est possible, tout en voulant éviter celle des autres – alors que c'est impossible. »

    (Marc-Aurèle. Pensées pour moi-même VII, 71)

     

    On se demande toujours avec les stoïciens : provocation, naïveté, méthode Coué ? Je t'explique, Marco.

    Premièrement chacun ne cherche vraiment à éviter que ce qui le gêne, lui. Or rares sont ceux qui ressentent leur propre méchanceté comme une gêne pour eux.

    Elle les amochise moralement ? So what ? Du moment qu'ils trouvent dans leurs actes ce qui leur fait envie : plaisir, pouvoir, argent, ils cherchent pas plus loin. 

    Deuxièmement plus on pense que la méchanceté des autres est inévitable, plus on s'autorise d'user de méchanceté envers eux. Légitime défense en quelque sorte.

     

    Conclusion, si tu me suggères, Marco, de réduire ma méchanceté par pure rationalité, OK je veux bien. Mais alors faut pousser le raisonnement jusqu'au bout.

    Et admettre qu'il peut arriver à l'autre, tout comme à moi, de chercher à éviter sa propre méchanceté, dans une vague lueur de rationalité.

    Mais si on ne l'admet pas, se donner du mal pour être quelqu'un de bien en sachant qu'en retour on ne peut que s'en prendre plein la gueule ? Tu y crois vraiment, Marco ?

     

    Alors mettons que je reformule ta pensée

    «on peut toujours essayer d'éviter sa propre méchanceté, vu qu'il n'est pas totalement improbable que les autres nous évitent la leur».

    Tu valides ?

     

  • L'arroseur arrosé

    « Veille à ne jamais éprouver à l'égard des misanthropes ce que les misanthropes éprouvent à l'égard des hommes. »

    (Marc-Aurèle. Pensées pour moi-même VII, 65)

     

    Voilà un travers, je le confesse, que j'ai du mal à éviter. Par exemple, je m'en suis donné à cœur joie avec ce pauvre Cioran (31-03-19 au 16-06-19). En fait je ne le regrette pas, on y trouve un indéniable plaisir.

    Comment l'expliquer ?

     

    Du point de vue cinématographique, c'est évident, on a affaire au bon vieux gag de l'arroseur arrosé. Et c'est un truc qui fait toujours rire, on n'y peut rien.

    Du point de vue logico-mathématique, avisons-nous de ceci que misanthroper un misanthrope est en quelque sorte annuler sa négativité, selon la règle apprise en calcul à l'école : « moins par moins égale plus ».

    Règle dont la transcription éthico-spinoziste serait : la diminution de tristesse est accroissement de joie.

    Et par là d'activité.

    Ce qui amène à remarquer que les misanthropes sont peu portés à l'action en général.

    Est-ce à dire que les misomisanthropes le seraient davantage ? Passionnant problème éthico-mathématique dont on doit préciser l'énoncé :

    la misomisanthropie doit-elle être envisagée selon la règle moins par moins? Ou doit-elle être considérée comme de la misanthropie au carré ? On me dira qu'est-ce que ça change ?

    Bonne question …

     

    Tu dis quoi, lecteur-trice ? Tu en as un peu marre de ces ergotages vains & absurdes ? J'admets.

    Mais avisons-nous de leur éventuel effet positif : dégoûtés de l'abstraction, ses inanités et ses possibles perversions, nous finirons par nous satisfaire du commerce de n'importe lequel de nos semblables humains. Que nous supposerons pour l'occasion pas trop con et pas trop méchant.

     

    Tu dis quoi lecteur-trice ? Ben oui, mais de temps en temps faut risquer des hypothèses osées, c'est comme ça que la science avance.

     

  • Il est beau

    « Il est beau ce passage de Platon : Celui qui veut tenir des propos sur les hommes doit regarder comme d'un lieu élevé les événements de la terre : troupeaux, armées, agriculture, mariages, divorces, naissances, décès, tumulte des tribunaux, déserts, divers peuples barbares, fêtes, deuils, assemblées, tout le désordre et l'harmonie du monde faite de contrastes. »

    (Marc-Aurèle. Pensées pour moi-même VII, 48)

     

    Le passage de Platon, bof je trouve (j'en dis ce que j'en sens). Ouais la fin à la rigueur c'est pas mal tout le désordre et l'harmonie du monde faite de contrastes.

    Mais entre nous la paraphrase qu'en fait Montaigne c'est autre chose : Notre vie est composée comme l'harmonie du monde, de choses contraires, aussi de divers tons, doux et âpres, aigus et plats, mols et graves. Le musicien qui n'en aimerait que les uns, que voudrait-il dire ?

    (Essais III,13 De l'expérience).

     

    Et puis alors le coup du lieu élevé, regarder de loin, ça c'est le Platon qui ne me dit rien. (Je sais c'est pas le propos) (mais j'ai déjà cité la phrase des Confessions de Rousseau : le lecteur n'a pas besoin de savoir tout cela, mais j'ai besoin, moi, de le lui dire).

    Cependant une chose est vraiment touchante, indépendamment du contenu de cette pensée, c'est l'admiration dont fait preuve Marc-Aurèle, en elle-même.

    Et plus encore son désir de nous la faire partager, désir naïf, presque enfantin, dans la spontanéité de ce « il est beau ».