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Le blog d'Ariane Beth - Page 356

  • "Là-bas les merveilleux nuages"

     

    « À quelque chose malheur est bon. »

     

    Les British disent avec infiniment plus de poésie « no cloud without a silver lining ».

    Soyons fair play et admettons-le : sur ce coup-là, leur langue de Shakespeare dame le pion haut la main à notre langue de Molière.

    En même temps, je veux pas en être une mauvaise, de langue, mais ils ont pas eu à chercher trop loin leur inspiration, hein, entre nous ?

    Côté nuages ils en connaissent un rayon.

    Et puis trouvaille, image poétique, je veux bien.

    Mais à partir du moment où on est capable de nommer un parapluie « ombrelle », ça veut surtout dire qu'on est dans la dissonance cognitive.

    Qu'on a perdu contact avec la réalité. Grave.

    Bon OK, j'admets que la stratégie du déni puisse leur être d'un grand secours pour rester flegmatiques dans le climat britannique. And, by the way, dans les affres brexitiques.

     

    Mais revenons à notre proverbe. À quelque chose malheur est bon … Et ? ...

    Vous pouvez préciser ? À quelque chose. À quoi en fait ?

    Et puis malheur ? C'est quand même un concept un peu large, une catégorie hyper ouverte. Entre le pas de chance que c'est la faute à personne ou le truc bien méchant qu'on vous cause en toute injustice, y a un abîme.

    Et bon ? Dans quel ordre de choses ? Matériel ? Éthique ? Et quel délai pour toucher la contrepartie ? Parce que c'est un peu l'idée quand même.

     

    On voit que ce proverbe est le genre d'allégation qui ne résiste pas à un interrogatoire serré.

    Pour ma part si je le mets en examen j'ai tendance à le soupçonner de chercher à servir d'alibi à l'injustice. D'avoir pour propos de fermer la bouche qui veut crier sa révolte, sa douleur.

    Vous voulez que je vous dise, c'est un proverbe opium du peuple.

    Même les Stoïciens ils avaient pas osé.

    Eux se contentaient de dire : Le malheur c'est du malheur, bon. (Sous entendu : OK on va pas en faire un fromage, mais y a pas non plus de quoi sauter au plafond).

     

    Bref nous conclurons à rien du tout malheur est bon.

    Mais ça n'empêche pas de contempler le nuage ourlé d'argent.

    À tant de choses beauté est bonne.

     

     

     

     

  • Cornélien

    « De deux maux il faut choisir le moindre. »

     

    Ah ah très drôle. C'est ce qui s'appelle avoir le mot pour rire.

    Parce que bon entre nous, lecteurs : on vous a déjà donné le choix une fois, à vous ?

     

    « Alors voilà : ici une maladie orpheline, là un bon diabète des familles. Choisis, fais-toi plaisir, c'est cadeau (du moins tant qu'à défaut de santé on a la sécu). »

    Ou bien : pour ta maison, tu préfères l'incendie ou l'inondation ?

    Ou encore : ton mec, t'aimes mieux qu'il parte avec ta meilleure amie ou avec son mari ? Ou les deux ?

    Charybde ou Scylla ? Peste ou choléra ?

     

    Inutile que je multiplie les exemples. Vous pourrez broder de votre côté ad libitum.

    Mais je ne veux pas être de mauvaise foi. Pour une fois.

    Il y a des cas, je vous le concède, où l'on a vraiment le choix. Des cas où l'on aura une véritable alternative : bouffer la patate ou bien en purée ou bien gratinée.

    Imaginons une élection présidentielle …

    Euh. Bref.

     

    De deux maux il faut choisir le moindre :

    « Un petit mal ?

    - Non merci j'ai déjà donné.

    - Mais si ! Regarde, là, le tout petit de rien du tout. Allez, pour finir la série noire ! »

     

    Car oui rappelons-le, souvent les maux arrivent groupés. Ils ont le sens du collectif.

    Eux.

    Du coup la seule chose restant à choisir ne sera guère que l'ordre dans lequel les prendre sur la gueule. Pour ce faire on tentera de les isoler, de façon à les liquider l'un après l'autre.

    Comme Horace avec les Curiaces si vous voyez.

    De deux maux il faut choisir le moins coriace.

     

    Et ensuite faut affronter, parce qu'on n'a pas le choix.

    Reste une seule liberté : choisir l'élégance de la légèreté. Euphémiser, litoter, ironiser : bref relativiser.

     

    De deux mots choisir le moindre, ça on peut toujours.

     

     

  • Publicité mensongère

    « Ventre affamé n'a pas d'oreilles. »

     

    Ah bon ? Et les berceuses aux bébés affamés ? Ça marche bien, que je sache ? ...

    Euh c'est peut être pas le meilleur exemple.

    Non mais sérieusement, je me demande bien où le sens commun a entendu une telle contre-vérité.

    Car si l'on raisonne en bonne dialectique (cf ce blog 8-01-17)

     

    1)(Verre à moitié vide)

    C'est évident que la faim aiguise les perceptions.

    Ventre affamé a non seulement des oreilles, mais aussi des yeux, un nez. Tous les sens entrent en éveil dès que la faim s'installe.

    Vieil héritage de nos ancêtres chasseurs cueilleurs sans doute.

    Dans le terrain hostile du supermarché il se réactualise pour notre survie. Traquer la viande du descendant d'urus qui se camoufle sous film plastique, harponner le filet de poisson surgelé tapi au fond du bac. Repérer les zones propices à la cueillette de café par paquets, ainsi que celles où sont parqués les troupeaux de bricks à traire.

     

    2)(Verre toujours pas plein)

    Faudrait déjà s'entendre sur les mots, être logique et cohérent.

    Rapprochons ce proverbe de l'expression « avoir l'estomac dans les talons ». Qu'est-ce qu'on en déduit ?

    Ventre affamé = estomac dans les talons = place libérée pour les oreilles.

    Et donc ventre affamé a forcément de grandes oreilles (voire aussi une gorge profonde). CQFD.

     

    3)(Synthèse hégélienne rendant compte du travail de l'Esprit dans l'Histoire)

    C'est pourquoi il est déconseillé d'aller faire ses courses quand on a faim. On en a tous fait l'expérience.

    On est alors prêt à gober, inondant nos oreilles captives de consommateur, toutes les sommations à l'achat intempestif concoctées par les officines publicitaires.

     

    Conclusion. Ventre affamé a des oreilles, et aurait souvent intérêt à se les boucher.