« n°25 : Requête
Je connais l'esprit de bien des hommes
Et je ne sais pas qui je suis moi-même !
Mon œil est bien trop près de moi –
Je ne suis pas ce que je vois et vis.
Je me serais bien plus utile,
Si je pouvais m'éloigner de moi.
Pas aussi loin qu'un ennemi !
Trop loin est déjà le plus proche ami –
Mais à mi-chemin entre lui et moi !
Devinez-vous ce que je demande ? »
(Friedrich Nietzsche. Le Gai Savoir. Prélude en rimes allemandes)
Ce que vous demandez ? Pas de réponse il me semble, juste de poser la question avec vous.
Et puis allez, en écho :
« Je connais bien mouches en lait,
Je connais à la robe l'homme
Je connais le beau temps du lai,
Je connais au pommier la pomme,
Je connais l'arbre à voir la gomme,
Je connais quand tout est de même,
Je connais qui besogne ou chôme,
Je connais tout, fors que moi-même.
(…)
Prince, je connais tout en somme,
Je connais colorés et blêmes,
Je connais Mort, qui tout consomme,
Je connais tout, fors que moi-même. »
(François Villon. Ballade des menus propos)
Et puis aussi, forcément :
« Je ne suis si attaché et mêlé à moi que je ne me puisse distinguer et considérer à quartier, comme un voisin, comme un arbre. »
(Montaigne Essais III,8 De l'art de conférer)