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Blog - Page 231

  • Au coin de la rue : scénarios

    Petite rue calme. Devant une villa, un homme arrête sa voiture, pour entrer aussitôt dans une autre, garée sous l'auvent, et il repart. Comme dans un film policier.

    Les vies de ces autres qu'on croise, romans passionnants peut être, mais dont on ne lira jamais qu'une bribe de phrase.

     

                                                                       

    Éparpillées par le vent, des feuilles de papier sur le trottoir. Curieuse, j'en coince quelques unes sous ma semelle pour les déchiffrer : il y a des polycops, et des notes prises d'une écriture pressée d'étudiant. Ça parle de psychologie.

    Acte manqué, ces feuilles abandonnées au vent ?

     

                                                                           

    Sur le toit d'en face

    Casting d'oiseaux pour Hitchcock

    L'air de rien font peur

     

                                                                        

    En arrivant à la hauteur du cinéma, je vois clignoter le camion d'urgence des pompiers. Crise cardiaque (du danger des thrillers ...), fausse route de pop corn ?

    Y en a qui ont pas de veine quand même. Tu comptes te faire un après-midi sympa avec un bon film et crac …

    Et puis devant la banque, je vois un pompier au distributeur, qui retire un peu de liquidité.

    Happy end.

     

  • Affirmative et légère

    J'ai lu Soif d'Amélie Nothomb. J'aime cet auteur, la lecture de chaque livre est comme une rencontre avec une amie.

    Peu importe le sujet, qui d'ailleurs est parfois fort mince. C'est l'écriture avant tout qui m'accroche chez un auteur, et l'écriture d'Amélie vraiment me parle.

    C'est intelligent, mais sans rien qui pèse et qui pose (comme dit Verlaine). On sent sa présence, la présence d'un vrai quelqu'un. Mais sans étalement, une présence qui ne s'impose pas, une présence polie. Voilà, polie ça lui va bien à Amélie.

    Cela je le ressens depuis longtemps. Ce que j'ai compris en lisant Soif, c'est pourquoi je me sens toujours si bien après avoir lu du Nothomb, légèrement euphorique.

    Son écriture est affirmative. Et pour cela elle m'affermit.

     

    Entendons-nous : affirmatif ne veut pas dire péremptoire. Ce serait presque le contraire. Il s'agit d'un mouvement que Nietzsche a formulé mieux que quiconque.

    « Je ne veux pas faire la guerre au laid. Je ne veux pas accuser, je ne veux même pas accuser les accusateurs. Que regarder ailleurs soit mon unique négation ! En somme toute, en grand : je veux même, en toutes circonstances, n'être plus qu'un homme qui dit oui ! » (Le Gai savoir Pour la nouvelle année).

    Le Jésus de Soif pourrait souscrire il me semble à ces paroles.

    (Tiens oui ce livre ne serait-il pas un peu l'Ecce homo d'Amélie ?)

     

    Et puis elle a aussi une autre qualité nietzschéenne, la légèreté.

    « Je me rappelle avoir marché des journées entières sur les chemins en me félicitant d'être heureux de rien. Je n'étais pas heureux de rien, je savourais la légèreté. » (Soif)

  • Etoiles filantes (7/7)

    La quatrième étoile, ce fut la plus limpide, la plus fine, la plus précieuse. Elle traversa le ciel d'un éclat bleuté, énigmatique. Elle avait l'air de poser une question. Laquelle ? Ça, mystère … Mais quelle importance, au fond ?

    La vieille Madeleine ferme les yeux.

    Elle perçoit tout à coup, présente, immédiate, chaque sensation de la lointaine nuit du lointain été.

    Les yeux fermés, s'y abandonne avec délice : la tiédeur, sous ses jambes nues, de la pierre où elle était assise ; l'odeur de thym et d'immortelle qu'exhalait la garrigue, rendant à la nuit les senteurs infusées tout le jour dans la fournaise du plein été ; les cris d'admiration de ses frères quand l'étoile avait jailli ; la vibration qu'elle avait ressentie dans sa paume ouverte.

    Comme si elle avait touché, oui, touché la lumière.

    Mais quel vœu lui avait-elle donc confié, à cette dernière étoile filante ?

     

    Quelle importance à présent, il faut laisser tout cela, elle est trop loin, la petite fille et ses nattes nouées de bleu dans la nuit de juillet.

    La vieille Madeleine bâille, elle est si fatiguée, allons, il faut aller se coucher, il est tard. Elle se lève lentement de son fauteuil. Ah, il faut encore mettre le pare-feu devant les dernières braises qui finissent de rougeoyer, c'est plus prudent.

    Elle se penche, la main sur ses reins endoloris, et alors dans le feu une voix se met à chuchoter tout près de son oreille. On dirait une voix de petite fille.

    « Mais si, rappelle-toi, voyons, tu n'es pas encore gâteuse quand même ! Ce que j'ai demandé, ce que tu as demandé à la quatrième étoile, c'est …

    ... oui ça me revient : je veux me rappeler exactement les sons, les images, les odeurs de ce moment, et retrouver ta beauté, belle étoile, au moment où il faudra …

    ... au moment où il faudra, comme ma grand mère, partir loin … Mais s'il te plaît …

    ... s'il te plaît, je ne veux pas partir dans le noir. J'ai trop peur du noir. Tu reviendras, étoile ? Tu viendras éclairer mon chemin ? »

    La vieille Madeleine sait maintenant qu'elle a eu raison de faire confiance aux étoiles filantes. Elle sait, aussi, que la petite fille aux tresses nouées de bleu ne l'a jamais quittée.

     

    Alors devant la cheminée où les dernières braises s'évanouissent, Madeleine laisse son vieux corps fatigué s'abandonner, doucement.

    Doucement, elle laisse ses yeux se fermer, avec pour toute consolation face à la nuit la clarté enfuie d'une étoile filante.