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Blog - Page 300

  • Ps 127 (4/5) Choisis la vie

    Dans la 2° partie du v.2 (qui constitue en gros le milieu du texte) il donne à son bien aimé le sommeil sonne de façon ambiguë : s'agit-il du simple repos quotidien ?

    Ou radicalement du repos dit éternel, qui seul consolera finalement des malheurs et angoisses de la vie dont l'évocation a occupé la première partie ?

    Cette ambiguïté, cet entre-deux évoque le fameux dilemme de Hamlet être ou ne pas être, mourir, dormir …

    Un dilemme envisagé dans un texte essentiel de la Bible : la vie et la mort, je les donne en face de vous, la bénédiction et la malédiction. Choisis la vie afin que tu vives, toi et ta descendance (Deutéronome 30, 19).

    Au v.3, le poète choisit de laisser parler la vie, au sens le plus simple et le plus concret, en tant que désir de la chair vivante de persévérer dans son être (dirait Spinoza). Dans le silence et la nuit, tout à coup la douleur se retourne en joie, la pulsion de mort en libido. De la nuit, du point mort, de l'angoisse opaque, germent la lumière, la vie et l'avenir.

    Choisis la vie afin que tu vives, toi et ta descendance. Voici, l'héritage de YHWH sont les fils.

    Choix de David d'aller consoler Bethsabée, après la mort du sans nom conçu dans un porte à faux du désir. Choix fécondant qui assure la transmission de la promesse en laissant germer le fruit du ventre.

    Telle est la réponse, simple mais décisive, donnée aux angoisses existentielles de l'être humain devant la "vanité des vanités". Pourquoi vivre, à quoi bon ? Mais parce qu'on t'a donné la vie. Alors choisis la vie, ta vie.

    Vis la vie, et si tu peux, si la vie t'en donne la possibilité, transmets-la à ton tour.

     

    Voilà qui est bel et bon. Oui mais. Il y a un petit hic dans la suite du texte.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

  • Ps 127 (3/5) Dors je veille

    Le texte du psaume présente deux parties bien différentes.

    Il commence par une sorte de point mort, dans un climat de découragement, de désillusion. En vain, trois fois répété, sonne comme une sentence. (Lalou et Calame traduisent pour la destruction).

    Si YHWH ne bâtit la maison en vain peinent ses bâtisseurs, si YHWH ne garde la ville en vain veille le gardien. En vain avancez-vous votre lever, retardez-vous votre repos, mangez-vous le pain des idoles.

    Et puis, de l'autre côté de la phrase-pivot Oui il donne à son bien-aimé le sommeil, les v.3-5 viennent soudain opposer, à la vanité et à la désillusion, la force, l'élan de la vie.

    Voici, l'héritage de YHWH sont les fils, la récompense, le fruit du ventre.

    Comme des flèches dans la main du preux, tels sont les fils de la jeunesse.

    Heureux l'homme fort qui en a empli son carquois. Ils n'ont pas honte quand ils parlent avec les ennemis à la porte.

    Maison, ville : les abris à l'intérieur desquels se déploient les liens sociaux, ceux de la famille, plus largement ceux de la cité. Des abris qui doivent être gardés. Question de sécurité et aussi d'ordre, d'ordonnancement de cette vie sociale.

    Fonctions que seul YHWH, affirme le texte, peut assumer disons pour de bon (par opposition à en vain et pour la destruction).

    Face au « mode-YHWH » est posé en repoussoir un « mode-idoles ». Le mot est parfois traduit par douleurs. De fait, manger le pain des idoles semble aller de pair avec une vie inquiète, affairée, épuisante. Aussi vaine que destructrice.

    Au contraire Il donne à son bien-aimé le sommeil. (On traduit parfois Il donne à son bien-aimé en sommeil = qui dort).

    En tant que spécialiste (pas de l'hébreu mais de l'insomnie), je penche pour la première interprétation. Quel est le frein au sommeil ? Préoccupations, soucis, angoisse, culpabilité, ce genre de choses (mettons de côté le bruit intempestif d'un voisinage indélicat). C'est à cela que vient répondre YHWH.

    « Tu peux dormir tranquille, moi je veille, et je serai là pareillement quand il s'agira au réveil de bâtir la maison, garder la ville. Je ne te lâcherai pas, tu es et restera mon/ma bien-aimé(e). »

    Le gardien bâtisseur, qui ne travaille pas en vain et à vide mais pour de bon, rejoint ainsi la figure du veilleur attentif à chaque souffle vivant du ps 121.

    Ce qui est demandé à David pour accomplir sa mission, c'est « seulement » la confiance en cette présence (pas le plus facile on est d'accord).

    Mais le psaume 127 ne s'arrête pas là.

     

     

     

  • Ps 127 (2/5) Du sans nom à Salomon

    David console Bethsabée, et neuf mois après arrive Salomon (II Samuel 12, 24), le grand roi qui bâtira le Temple, réunira sous son pouvoir les deux royaumes Juda et Israël.

    Dans cet épisode comme dans les v.2-3 du ps 127, Salomon apparaît comme l'enfant du pardon, un gage de réconciliation entre David et YHWH.

    Sans doute la réconciliation est-elle avant tout celle de David avec lui-même.

    Dans la citation de la note précédente aller se prosterner dans la maison de YHWH, peut en effet s'interpréter, dans la logique du nom (cf Au pluriel), comme aussi bien rentrer en soi-même, se recentrer sur son authenticité existentielle.

    Ce faisant, David reconnaît, au delà de l'injustice du salaud dont Nathan lui a renvoyé l'image, son manquement à la justesse de son être, à son désir essentiel, être un roi selon YHWH (cf ps 51). Ce manquement reconnu, le désir est relancé, désir de vivre, d'aimer Bethsabée, de s'assumer comme répondant de la promesse.

    La mort de l'enfant ne peut manquer d'évoquer l'histoire d'Abraham. Se croyant sommé de sacrifier son fils Isaac pour prouver sa foi en Dieu, il obéit, mais en sera empêché in extremis par un ange (Genèse 22,12).

    Un texte fondamental, en ce qu'il pose le refus d'une image divine despotique et avide de sacrifice. Mais ici au contraire, il y a bel et bien un enfant qui meurt, un sacrifice semble donc accompli (une réparation de la faute envers un dieu un tantinet Moloch).

    L'auteur du livre de Samuel aurait-il une conception religieuse plus archaïque que l'auteur du chap 22 de la Genèse ?

    Ce n'est pas exclu, mais remarquons un fait troublant : le texte ne donne pas de nom à ce premier enfant, alors que dans la Bible, dès qu'un enfant naît (du moins un fils) (sans commentaires les filles), sa nomination se fait immédiatement, rapportée à sa généalogie ou aux circonstances de la naissance.

    Le nom est signifiant, le nom c'est l'être. Or voilà : ce fils-là est un sans nom.

    Et si c'était pour signifier qu'il n'est pas pour David le fils de sa vérité, de son désir, de son être ?

    La mort réalisée dans ce texte serait alors (au delà de celle du bébé) (réel ou fictif) (en tous cas un petit malchanceux qui écope de cette place symbolique) celle du dévoiement de David, de sa soif de jouissance et de pouvoir qui l'a conduit à la félonie et au meurtre.

    À présent, il va retrouver sa place de roi-messie, d'élu, mais pourquoi faire ?