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Le blog d'Ariane Beth - Page 312

  • A chacun son Rubicon

    « Alea jacta est »

     

    est supposé avoir dit Caius Julius Caesar en franchissant le Rubicon.

    Vu l'absence de deuxième amendement dans la constitution de la république romaine, franchir armé le Rubicon (cours d'eau délimitant le territoire de la cité) revenait à manifester son projet de coup d'état : c'est un petit pas pour ma caliga, mais un pas de géant vers le pouvoir.

    Avec son coup de dés Jules abattait ses cartes.

    Coup d'état annoncé, préparé de longue date (entre autres par la guerre des Gaules) (médiatisée par le livre d'un certain César Jules) (on n'est jamais mieux servi que par soi-même).

    Car César, en homme d'action, sait que la chance ne s'attend pas les bras croisés. La chance ne doit rien au hasard. La sienne en tous cas se fabrique, se calcule.

    Devant l'aléatoire de toute entreprise humaine, autant être celui qui jette les dés. Et souvent après les avoir pipés pour être plus sûr de son coup.

    Le premier Rubicon franchi est parfois un Rubicon éthique.

    Oui mais voilà, comme dit Mallarmé dans un poème aussi célèbre qu'illisible

    Le coup de dés jamais n'abolira le hasard

    César fut rattrapé par un aléa que nous supposerons psychologique. Le fils d'un grand homme, pour exister, doit tenter comme on dit de se démarquer, d'aller sur un autre terrain que celui de Papa.

    D'où l'intérêt de Brutus, fils adoptif de Jules, pour la défense de la république ou ce qu'il en restait.

    (Quoique. Intérêt oui mais engagement sincère ?)

    (Bonne question, Sigmundus Amicus).

    Et puis après, vous savez ce que c'est, une chose en entraîne une autre … Contestation, meurtre symbolique ... Et tant qu'on y est, le meurtre réel c'est plus sûr.

    Et c'est ainsi que le jour des ides de mars, César, incrédule autant que sanglant, a émis une autre (et définitive) parole historique en reconnaissant son fiston Brutus parmi ses assassins. Tu quoque fili arrgh ...

    Il venait de comprendre tout à coup que les dés avaient changé de main.

     

     

     

     

     

  • Travail d'artiste

    « Qualis artifex pereo »

     

    Phrase doublement raccord avec la précédente. Prononcée (dit-on) par l'empereur Néron avant son suicide, elle signifie quel artiste meurt avec moi.

    Mot à mot quel artiste je meurs : admirons la concision du latin, une de ses grandes qualités. (Quand je dis le latin je veux dire la langue latine, parce que sinon globalement les latins sont pas toujours concis concis, surtout quand ils parlent d'eux).

    Néron ne s'est pas suicidé de son plein gré vous vous en doutez. On le lui a gentiment suggéré.

    Juste retour de bâton (d'épée de poison etc.) après tout, pour qui a fait de même avec plusieurs personnes de son entourage. (Entre autres Sénèque qui fut son précepteur) (un sacré échec pédagogique hein).

    Bref Néron n'était pas un type très recommandable

    (Sénèque déjà plus) (quoique : stoïcien mais attaché à l'argent) (nobody's perfect).

    Aucun des empereurs romains ne fut recommandable en fait.

    Y compris Titus surnommé les délices du genre humain (par je sais plus qui, Suétone j'imagine). Ça dépend de quel genre on parlait, demandez aux habitants de Jérusalem en 70 post JC, pour lesquels ledit Titus organisa un remake de l'incendie de Troie.

    D'ailleurs Racine n'en dit pas que du bien non plus dans sa Bérénice.

    OK il faut mentionner le seul à qui on n'ait à peu près rien à reprocher (sauf quelques campagnes militaires par ci par là, broutilles quand on est dans ce genre de job) : Hadrien, cet empereur philosophe dont Marguerite Yourcenar se fit la mémorialiste apocryphe autant qu'inspirée.

    Mais globalement la balance ne penche pas dans le bon sens. Les dynasties d'empereurs n'ont pas manqué de brutes zépaisses. Et aussi hélas zaffinées.

    Le raffinement n'est pas un gage de non-brutitude, l'Histoire n'a cessé de le confirmer avec sa grande hache. Il lui arrive de faire fort bon ménage avec la perversion.

    Néron fut de ces pervers brutaux-raffinés. Poète et musicien, peut être avec talent pourquoi pas. La légende le montre chantant une œuvre de sa composition devant Rome en flammes (incendie également son œuvre, disent les mauvaises langues, latines ou pas).

    Puis, non content d'avoir brûlé les planches, il brûla dans la foulée un lot de chrétiens, la rumeur qu'ils étaient les incendiaires s'étant répandue comme une traînée de poudre. Rumeur lancée par Néron pardi (à ce qu'on dit).

    Une séquence (crime, calomnie-alibi pour élimination d'ennemis et opposants) reproduite souvent avec intrigues et protagonistes variés dans nombre de superproductions historiques, pour un succès jamais démenti.

     

  • Game is over

    « Acta est fabula »

     

    L'empereur auprès de qui Mécène faisait du lobbying pour Virgile s'appelait Caïus Julius Octavianus Augustus de son petit nom. CJOA si vous voulez.

    Quoique. On risquerait de confondre avec le sigle de l'association Contre JO Arnaque (association à laquelle je vous incite à adhérer en masse, Parisiens, Franciliens, Français) (ah vous serez trop contents payer des impôts pour engraisser les sponsors d'athlètes dopés ? OK j'ai rien dit).

    Bon pour notre CJOA du coup je vais dire juste Octave comme tout le monde. Ou Auguste comme d'autres tout le monde. Il fut le premier empereur de Rome.

    En fait pour faire moins genre coup d'état dictature tout ça au début ils ont dit princeps senatus = premier personnage du Sénat.

    Comme on en a un chez nous oui si vous voulez.

    Sauf qu'Octave sur les statues a plutôt le look d'un Bogosse que d'un vieux tout bouffi de s'être gavé toute une vie de sa rente élective.

    (Ce qui ne signifie pas qu'Octave ne se soit pas gavé pour sa part j'en conviens) (mais n'étant pas citoyenne romantiquaine, je me contente de m'indigner in situ sur la vie politique présente de mon pays) (y a déjà suffisamment à faire) (chacun suam merdam après totum).

    À propos de Bogosse, Octave était conscient qu'exercer le pouvoir était aussi le mettre en scène. D'où la storytelling Énéide.

    D'où aussi la phrase dont j'allais vous causer quand vous m'avez interrompue avec votre militantisme anti-JO primaire.

    Et autre contestation de prétendus serviteurs désintéressés de la démocratie, style Tartufe n'est pas mort.

    À propos, Acta est fabula signifie la pièce est jouée. Rideau, en quelque sorte. Auguste l'aurait dit sur son lit de mort. J'ai fait le maximum pour tenir mon rôle, maintenant je quitte la scène. (Mais il n'est pas interdit de me rendre un hommage posthume à la prochaine cérémonie des Césars) (à bon entendeur ave).

    Je dis pas c'est une dernière phrase qui se défend, ça vous a un petit air de distanciation brechtienne.

    Mais pour ma part, et pour rester dans le contexte théâtral, j'avoue que sans vergogne j'aurais plutôt lancé : bis !

    On sait jamais ...