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Blog - Page 469

  • Un procédé médical

    « La psychanalyse est un procédé médical qui tend à la guérison de certaines formes de nervosité (névroses) au moyen d'une technique psychologique. »

    Freud commence par cette phrase un article de 1913 intitulé L'intérêt de la psychanalyse. Il vaudrait mieux dire l'intérêt pour la psychanalyse, car c'est ainsi que le pense la construction allemande : das Interesse an etwas. La préposition an indique un mouvement vers, le fait de prendre quelque chose en considération, de l'envisager. Et c'est exact, pour découvrir l'intérêt de quelque chose, il faut faire le petit déplacement qui permet de se situer au bon point de vue, c'est à dire en face. L'intérêt qu'on porte à quelque chose ou quelqu'un est ainsi d'emblée interactif, comme le signale la construction allemande. Alors qu'en français en disant l'intérêt de quelque chose on a l'air de dire qu'elle est intrinsèquement intéressante, qu'elle se suffit en quelque sorte à soi-même. Mais non : pas de vérité sans vérificateur.

    Ceci vaut bien sûr de façon essentielle pour la psychanalyse. On connaît l'avertissement de Platon « Nul n'entre ici s'il n'est géomètre ». Tout autant certes, nul ne peut comprendre Freud s'il met sa rationalité dans sa poche, mais surtout il doit se faire bon peseur de mots. Car la psychanalyse repose sur la conviction (et l'expérience) qu'on ne parle pas pour ne rien dire, que chaque parole s'inscrit dans un sens précis. Ce bon vieux Sigmund nous invite donc nécessairement à critiquer, interroger, décortiquer ses propres mots. Le tout est de le faire avec un scalpel et non une hache. Eviter aussi de les écraser à coups de marteau comme un bourrin qui au fond « n'en veut rien savoir » (et je ne veux nommer personne).

    Revenons à la phrase. J'y relève, à l'intention du bourrin non sus-nommé et de quelques autres, les modulations circonspectes : un procédé, et non le procédé, qui tend à la guérison et non qui guérit, certaines formes de nervosité, et non tout le domaine nerveux (= psychologique et neurologique). De plus les termes procédé et technique insistent sur le côté pragmatique, voire artisanal de la chose. Une définition donc très factuelle, qui n'a rien de démiurgique. Disons-le clairement, ici Freud ne cherche pas à se la péter. (J'admets que ça lui arrive, encore qu'il faille faire la part d'un second degré pas toujours perçu).

    Ce qui est intéressant surtout, c'est qu'il place la psychanalyse à l'intérieur de la médecine. Freud est multiface : soignant, anthropologue, philosophe, philologue etc. D'ailleurs l'article en question fait le point sur l'apport qu'il pense être celui de la psychanalyse en plusieurs domaines, de la biologie à l'esthétique, en passant par la sociologie ou la pédagogie, ce qui en fait un des meilleurs résumés de sa démarche et de son œuvre. Manque juste le rapport à la religion, auquel il a commencé à s'intéresser l'année précédente avec Totem et Tabou. Ici, dans cet article essentiel, il affirme donc avant tout : le fondement et le but de la psychanalyse est le soin.

     

     

  • Car j'en suis là ...

    Car j'en suis là que, sauf la santé et la vie, il n'est chose pourquoi je veuille ronger mes ongles, et que je veuille acheter au prix du tourment d'esprit et de la contrainte,

    « à si grand prix, je ne voudrais pas de tout l'or que roulent vers la mer les sables du Tage ombragé » (Juvénal)

    extrêmement oisif, extrêmement libre, et par nature et par art. Je prêterais aussi volontiers mon sang que mon souci ».

    Montaigne, Essais II,17De la présomption

     

    1° Encore Montaigne ! Ben oui j'y peux rien, il n'y a que lui qui me retienne. Ce n'est pas faute, pourtant, d'avoir cherché autre chose à dire, ni parcouru mes divers écrits pour en extraire un poème, une nouvelle que je vous aurais passée en épisode, un commentaire d'autre chose etc.

    Mais a) sur les choses qui valent la peine qu'on en parle, style les horreurs mondiales en matière de guerres à la con, de scandales écologiques & sanitaires, d'injustices en tous genres (et surtout celles qui portent sur le genre féminin), de lamentable incapacité et/ou cynisme des politiques (qui il faut bien le dire donnent le meilleur d'eux-mêmes en ce moment), je préfère ne rien dire, car je n'ai rien de vraiment intelligent à dire, et en plus vu que je ne suis pas capable d'agir pour que ça change, autant fermer ma grande gueule.

    b) mes écrits déjà écrits ne sont pour la plupart pas adaptés au format blog, trop longs, trop construits, bref trop écrits.

     

    2° N'en déplaise à Juvénal comme à Montaigne, moi j'avoue qu'on me filerait tout l'or en question, j'accepterais les quelques soucis qui vont avec, parce qu'entre nous si le fric cause des soucis, c'est rien à côté de ceux qu'il enlève. Et peut être d'ailleurs que j'en profiterais pour m'acheter une belle baraque au bord du Tage où aller passer l'hiver. Vous seriez invités.

     

    3° Quant à prêter mon sang, pourquoi pas, mais pas à n'importe qui.

     

    4° Pour les ongles, je fais beaucoup d'efforts.

     

    5° Pour tout le reste, OK « j'en suis là ».

     

     

    6° Oisif ne veut pas dire, est-il utile de le préciser, paresseux ou inoccupé. Montaigne était parfois capable de paresser, mais moi pas hélas, une des nombreuses raisons pour lesquelles je me sens toute petite devant lui. Etre oisif, dans l'otium, veut dire s'occuper des choses qui valent vraiment la peine : savourer la joie d'être vivant et en relation avec le monde (choses et gens), penser, jouer, rire, admirer ce qui est beau (œuvres d'art, paysages, gens qui sont quelqu'un de bien), écrire. Du moins essayer.

  • Zzzz ...

    Ceci est dans mon édition de Robert (2012) le dernier mot pour z, et par conséquent le dernier mot, absolument, qu'il nous délivre dans son auguste bienveillance dictionnariale.

    Onomatopée notant un bruit continu qui vibre légèrement (bourdonnement d'insecte, ronflement, bruit d'un coup de fouet etc.)

    « La dame enfonce une longue épingle à chapeau dans son chapeau, zzzzz, à travers la cervelle ! » Green.

     

    Robert, mon Petit, décidément tu n'es jamais décevant, jusqu'à la fin tu nous auras bluffés ... Vous conviendrez en effet que cette définition n'est pas sans mérite côté zinzinitude. D'abord la forme bien zarbie, quatre z suivis du point de suspension, franchement ! OK c'est j'imagine pour faire genre « voyez à l'onomatopée comme à l'onomatopée, zzzz … onomatopète nettement mieux que zzz. Mais attention on ne fait pas non plus de frime inutile, style zzzzzz !!!!! On fait juste ce qu'il faut comme il faut, car on sait se tenir, on est un dico pas un tabloïd … »

     

    Ensuite je ne voudrais pas pinailler mais est-il scientifiquement exact de dire qu'un bruit « vibre »? N'est-ce pas plutôt l'inverse, une vibration qui est perceptible, vu son spectre, sous forme de bruit ? Et je ne suis pas sûre que « continu » soit l'adjectif le plus approprié, perso j'aurais mis « répétitif » ou « ininterrompu ». Car continu connote quelque chose de lissé. Si j'avais à représenter « continu », je dessinerais une ligne droite d'épaisseur constante. Or les exemples donnés évoquent de toute évidence une ligne brisée, au tracé marqué de pauses et de reprises. Quiconque a tenté de faire une sieste sous les pins et maudit les cigales jusqu'à la millième génération me comprendra. De même me comprendra quiconque a espéré vainement, après une journée harassante, plonger dans un sommeil réparateur aux côtés de son compagnon ou sa compagne de lit appliqué(e) à un ronflement mi-porcin mi-félin. Qu'en déduire, sinon le tempérament sadique et provocateur de Robert, qui ose ici parler de vibration légère ?

     

    La piste sadique semble se confirmer avec le dernier exemple bruit d'un coup de fouet. (Et que dire de l'atroce citation de Green !) Certes, ayant assez peu fréquenté les chiourmes de galère, les mines de sel, certes n'ayant pas participé à mon corps défendant et dans le rôle du Noir esclavagisé au commerce triangulaire de la grande époque, certes n'ayant pas non plus été cheval (ou bien il y a longtemps, oubien j'ai oublié, et de toutes manières je ne crois pas à la réincarnation, surtout en vieille carne), j'ai une notion approximative du bruit exact d'un coup de fouet. Mais je le noterais plutôt ffff, ou à la rigueur ssss. Car zzz est clairement une chose et une seule : le bruit de l'épée d'un cavalier masqué qui zèbre tout ce qui passe à sa portée, d'un Z qui veut dire Zorro.