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Blog - Page 66

  • C comme ...

    « Calembour.

    Une forme d'humour à laquelle le sage condescend et le crétin aspire. »

    (Ambrose Bierce Le dictionnaire du diable)

    Eh bien c'est clair je suis une crétine de concours, car j'adore les calembours. Mais pour ma défense, je verse au dossier cet élément, trouvé un peu plus loin dans le dictionnaire :

    « Legs (legacy).

    Don de celui qui quitte le monde à toutes jambes (legs) ou a déjà un pied dans la tombe. Peut on à juste titre appeler « legs de guerre » l'infirmité d'un soldat unijambiste ? Voilà une question d'étymologie qui a fait couler beaucoup d'encre. »

     

    « Cénotaphe.

    Tombe d'où le corps s'est absenté, pour aller vivre ailleurs. La tombe dont la pierre portait l'inscription fameuse : Ci gisent mes deux enfants chéris L'un en vieille Irlande Et l'autre ici était un cénotaphe, en ce qui concerne celui qui est ''en vieille Irlande'' ».

    C'est bien, hein ? Pas de doute, c'est vraiment l'humour noir qui stimule le mieux la verve de Bierce.

     

    « Choeur.

    À l'opéra, un groupe de derviches hurleurs qui terrorisent l'auditoire pendant que les chanteurs reprennent haleine. »

    Voilà qui laisse mon clavier muet.

     

    « Circonlocution.

    Artifice littéraire au moyen duquel l'écrivain qui n'a rien à dire en fait part au lecteur – avec tact. »

    Dois-je le prendre pour moi ? Merci au moins pour le tact, Ambrose.

     

    « Club.

    Association d'hommes qui se proposent l'ivrognerie, la gloutonnerie, une dégoûtante hilarité, le meurtre, le sacrilège et la calomnie des mères, des épouses et des sœurs. Je dois cette définition à plusieurs femmes respectables disposant des meilleures sources d'information : leurs maris font partie de divers clubs. »

    Bierce manie avec aisance l'art de la définition à double détente, l'implicite. On en a un bel exemple ici : car on n'ose ici deviner les circonstances où il a eu l'info de la part de ces dames ...

     

  • B comme ...

    « Baptiser.

    Affliger d'un nom avec solennité un enfant démuni. »

    (Ambrose Bierce Le dictionnaire du diable)

    C'est vrai que le pauvre bébé est à la merci de lubies parentales plus ou moins inspirées, et souvent au goût du jour, qui n'est pas toujours le bon goût.

    Il lui reste la solution de changer de nom dès que ce lui sera possible légalement, à sa majorité par exemple.

     

    Mais ce n'est pas si facile :

    « Voici la seule astuce du baptême : l'enfant est mouillé pour que le nom colle. »

    Joli, non ? Elles sont assez nombreuses dans le livre, de telles définitions un tantinet loufoques, voire carrément surréalistes.

     

    Et ça fait du bien, vu la teneur globalement sombre du propos.

    « Bombe ou obus.

    Argument de l'assiégeant en faveur de la capitulation, mis avec doigté à la portée des femmes et des enfants. »

    Beaucoup de définitions de ce dictionnaire du diable sont marquées par l'expérience de la guerre vécue par Bierce*. Et encore il est mort avant de voir celle de 14, œuvre du diable particulièrement réussie, au point que depuis la méchanceté humaine a eu à cœur de ne pas démériter en ce domaine.

     

    « Biographie.

    Hommage littéraire rendu à un grand homme par un petit. »

    Alors ça, ça se discute. Pour ma part je trouve que les biographies écrites par Stefan Zweig signent sa propre grandeur. Qui consiste en la capacité à comprendre finement l'autre, comme de l'intérieur. Et quel souffle dans celle qu'il consacre à Montaigne, quelle lucidité (et à son propre usage) dans celle d'Érasme.

     

    *cf sa présentation (Appareil littéraire malveillant 23 septembre)

     

  • A comme ...

    « Acclamations.

    Unité monétaire propre à la populace pour payer ceux qui la flattent et la dévorent. »

    (Ambrose Bierce Le dictionnaire du diable)

     

    Jusqu'au moment où elle comprend que ceux-là ne la flattent que pour la dévorer.

    Alors les acclamations se changent en huées. Auxquelles d'autres flatteurs-dévorateurs, aspirant à être à leur tour acclamés par elle, excitent la populace.*

     

    Mais quand la situation se tend vraiment ? Qu'à cela ne tienne, on dispose d'un joker.

    « Arbitrage.

    Moderne trouvaille pour aggraver un conflit en remplaçant le différend initial par une flopée de désaccords inévitables sur la manière de parvenir à le régler. »

     

    Un joker qui fait aussi merveille en politique internationale.

    « Arbitrage.

    Médecine brevetée pour modérer la fièvre internationale, conçue pour supplanter la saignée à l'ancienne. De sorte que le pays qui n'a pas le dessus haïra deux nations ou plus au lieu d'une … au bénéfice ô combien indicible de la paix. »

     

    Ben oui. Politique et bons sentiments ça fait deux. Heureusement ?

    « Affectueux.

    Nuisible par vocation. La créature la plus affectueuse est un chien mouillé. »

     

    Conclusion : le mieux est de ne rien attendre de rien.

    « Attente.

    Dans le cortège des émotions humaines, l'état d'esprit que précède l'espoir et que le désespoir suit. »

     

     

    *Je ne sais quel est le mot employé par Bierce, mais je gage qu'il indique non tant un mépris de classe qu'un découragement devant la connerie) (et encore il n'aura pas connu les résasociaux, ce petit veinard).